jeudi 16 février 2017

Pour un jeune ami que je ne connais pas

Ce matin, je reçois un message me disant "Si tu ne peux pas venir à la réception, un de tes fervents admirateurs va être très déçu, il espérait échanger avec toi ! Peut-être as tu un truc à la "Mélenchon" pour te dédoubler ?".

Oui, j'ai un truc, mais pas un truc à la Mélanchon ; un truc à la Hervé This, et qui consiste précisément à discuter d'abord la question de l'admiration. Ce sera ma première façon d'interagir avec mon ami que je ne connais pas.

L'admiration, donc ? Le seul dictionnaire qui vaille, le Trésor de la langue française informatisé, nous dit : "Sentiment complexe d'étonnement, le plus souvent mêlé de plaisir exalté et d'approbation devant ce qui est estimé supérieurement beau, bon ou grand."
On voit que je ne mérite pas d'admirateur, ou, du moins, que mes éventuels admirateurs se trompent en m'estimant "supérieurement beau, bon ou grand". Ce n'est pas de la fausse modestie, mais du réalisme. Je me lamente de ne pas savoir assez bien calculer, de ne pas être assez méthodique, pas assez précis, trop hâtif, pas assez concentré... Jusqu'en classe de Mathématiques spéciales, les professeurs marquaient sur mon bulletin "Peut mieux faire". Oui, peut mieux faire.

Cette question de l'admiration ne se pose pas à moi pour la première fois : lors d'une mission à l'étranger, le doyen d'une grande université avait un discours élogieux, prononçant le mot "fierté". Fierté ? Je ne suis fier de rien, et j'ai seulement envie de faire beaucoup (ou, plutôt, je ne cesse de faire... car l'envie n'est rien sans la réalisation, n'est-ce pas ?). Car c'est l'étendue de mes insuffisances qui m'atterre. A l'époque, j'avais fait l'observation au doyen élogieux, et il m'avait répondu qu'il était important de montrer à la fois une personne et son travail, afin de montrer aux suivants qu'il était humain d'arriver à des réalisations qui paraissent notables.

Convaincant ? Pas sûr. Je préfère reprendre l'analyse de cette difficile question... avec mes propres "admirations".
Enfant, j'ai été ébloui par Antoine Laurent de Lavoisier. Mais ébloui au point que je suis tombé dans le panneau de quelques unes de ses erreurs ; et progressivement, j'ai découvert certaines de ses faiblesses humaines... au point qu'une analyse récente d'un de ses articles a été jugé "cruel" par des historiens des sciences (H. This, N3AF, https://www.academie-agriculture.fr/publications/les-academiciens-ecrivent/n3af/n3af-2016-8-methodological-advances-scientific).
Puis, plus tard, j'ai trouvé Michael Faraday très remarquable. Là, la personne humaine  était effectivement remarquable, parce que Faraday fut un autodidacte sauvé par quelques principes intellectuels à propager absolument.
J'ai la chance d'avoir ou d'avoir eu quelques amis merveilleux, ce que je nomme de "belles personnes"... Ce sont toutes des personnes qui sont passionnées de leur travail, qui ne se posent pas la question de la réputation, mais de l'action effectuée ou à effectuer. Ai-je pour elles de l'admiration ? Je ne crois pas : de l'amitié, certainement, et de la reconnaissance de faire ce que font de belles personnes, à savoir nous surprendre à chaque instant par des idées neuves.
Quelques peintres ? Je passe rapidement devant, car je suis un imbécile. Quelques musiciens remarquables ? Alors je préfère jouer de la musique, dans l'espoir d'une amélioration. Pas grande place pour l'admiration, chez moi ; pas le temps !

Cela étant, à quoi bon admirer ? On ne refera jamais l'histoire, et je préfère que mes amis occupent mieux leur temps qu'avec l'admiration : pourquoi n'utiliseraient-ils pas plutôt ce temps contemplatif pour faire grandir ou entretenir dans leur coeur des brasiers qui les conduiront à faire demain mieux qu'ils n'ont fait hier ? 
Certainement la fréquentation de certains permet d'en retirer quelque chose, et j'espère tendre à mes amis de la méthodologie. Si je peux être crédité de quelque chose, c'est peut-être seulement de cela : dans mes cours de Master, par exemple pour le Master Erasmus Mundus Plus "Food Innovation and Product Design" (https://tice.agroparistech.fr/coursenligne/main/document/document.php?cidReq=FIPDESMOLECULARGASTR&curdirpath=/docs%20HTHIS), je ne cesse de discuter la question de la méthode. Et toujours en améliorant (obsessionnellement?) ce qui a déjà été fait !

Bref, l'admiration m'est un sentiment d'autant plus étranger que je suis dans l'action, et pas dans la contemplation. Mais, surtout, à quoi bon ?
En revanche, je suis très soucieux d'avoir beaucoup d' "amis", c'est-à-dire de personnes qui partagent le goût de la connaissance, qui dénichent pour moi des pépites de connaissance, qui m'aident à grandir. J'espère vivement que  mon ami inconnu "échangera" librement avec moi : je réponds à tous les emails.

vendredi 10 février 2017

CV

Des élèves qui font un TPE me demandent un cv à jour. J'en mets un sur https://sites.google.com/site/travauxdehervethis/ 


Cela dit, s'il est à jour, il est bien incomplet, parce que je ne parviens pas à suivre tout ce que je fais... et que cela ne m'intéresse pas : moi, c'est ce que je fais qui me passionne, pas ce que j'ai fait.
Dit autrement, j'utilise bien sûr mes erreurs pour m'améliorer, mais la question est plutôt : comment faire toujours mieux ? Dans un de mes livres, je cite Michel Eugène Chevreul, qui disait "tendre avec effort vers la perfection sans y prétendre"... mais l'idée de la perfection nous empêtre : ne pouvons-nous nous contenter de faire de mieux en mieux ?

jeudi 9 février 2017

Aujourd'hui, c'est intermédiaire

On sait que je réserve pour ce blog des idées "politiques", alors que je mets dans le blog "gastronomie moléculaire" des idées de cuisine.

Aujourd'hui, j'ai hésité, parce qu'il s'agissait d'une discussion technique... qui avait un rapport avec des questions d'enseignement et d'ignorance.

Bref, j'ai tranché : le billet du jour est sur le blog http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/2017/02/jai-la-rate-qui-se-dilate.html

dimanche 5 février 2017

Conformément à mes résolutions...

Conformément à mes résolutions, c'est sur le blog de "gastronomie moléculaire" que j'ai posté un billet aujourd'hui :


http://gastronomie-moleculaire.blogspot.fr/2017/02/les-huiles-essentielles.html


OK, ce n'est pas super positif, parce qu'il s'agit d'une mise en garde, mais tout dépend comment on la prend : enseigner des usages, c'est positif, non ?

Quand est-on un expert ?

Par les temps qui courent, on voit des individus qui, ayant un peu exploré un sujet, s'en prétendent expert. Quelle prétention !


Le risque est pour tous, moi compris ! On lit une publication de vulgarisation, et l'on croit être aussi savant que ceux qui savent que la vulgarisation n'est qu'un « récit », fait pour ceux qui ne sont pas en mesure de comprendre les publications scientifiques. Un sociologue (j'en ai au moins deux en vue) passe quelques mois dans un laboratoire de recherche en science de la nature, et il croit savoir ce que sont les sciences de la nature, au point d'en faire un fond de commerce qui l'alimente toute une carrière (minable). Un (mauvais) scientifique lit une publication, et il se croit à jour de ses connaissances sur le sujet.

Il y a des secteurs plus exposés que d'autres. Les plus exposés, ce sont évidemment ceux où il y a de l'argent ou du pouvoir en jeu. Il en va, ainsi, de la diététique (on vend des régimes), où j'ai vu un président d'association pérorer à l'aide de termes tels que "acides gras insaturés" sans savoir construire un modèle moléculaire d'un tel composé. Il en va ainsi de certains élus, qui confondent leur élection avec un brevet de compétence/connaissance des champs techniques sur lesquels ils doivent trancher.

Il en va ainsi de la presse, hélas, aussi, où j'ai vu mille fois des journalistes prétendre en savoir autant que des professionnels après une "enquête". Par exemple, en médecine, il est arrivé mille fois que de telles personnes écrivent sans se faire relire, oubliant que tout est bien compliqué, croyant pallier dix ans d'étude avec quelques semaines de travail. Par exemple, pour ce qui concerne l'environnement, où l'on voit des individus parler avec aplomb de choses qu'ils ne "comprennent" pas, confondre des traces de pesticides avec des quantités au-dessus des seuils toxiques, confondre des molécules et des composés...
Mais le pire, dans tout cela, reste le cas évoqué plus haut de ceux qui confondent la science et son récit. Un épistémologue des sciences de la nature ne sait rien s'il ne sait pas les équations. A minima, il devrait y avoir la capacité de les comprendre, à défaut de les produire. Sans quoi, ce sont des mots vidés de sens.

Suis-je excessif, dans ces déclarations ? Je ne sais pas, mais je recommande à tous ceux qui le penseraient la lecture d'un article scientifique intitulé Unskilled and Unaware of It: How Difficulties in Recognizing One's Own Incompetence Lead to Inflated Self-Assessments, ce qui signifie "Incompétent et inconscient de l'être : comment les difficultés à reconnaître sa propre incompétence conduit à une surévaluation de ses compétentes", par Justin Kruger et David Dunning (Journal of Personality and Social Psychology, 1999, vol 77, N°6, pp. 1121-1134).

samedi 4 février 2017

Le jambon de Bayonne et autres produits alimentaires

Oublions les groupes de pression, et revenons à des idées simples et justes, qui ne sont pas embobinées par un certain commerce. Il est choquant (et malhonnête) de nommer "champagne" un vin qui serait produit ailleurs qu'en Champagne, tout comme il est choquant de nommer camembert un fromage qui ne serait pas fait en Normandie.

Il en va de même, en charcuterie. Par exemple, pour un jambon de Bayonne, il doit s'agit de jambon (commençons par dire le plus important), provenant de porcs élevés dans la région de Bayonne, et travaillés selon les règles en vigueur, de celles qui distinguent un jambon cru d'un jambon cuit, par exemple. Il n'y a pas assez de porc pour que des industriels puissent vendre du "jambon de Bayonne" ? Tant pis, ils vendront autre chose.

Le fromage "fermier" ? Il doit être produit dans une ferme.  Le fromage au lait cru ? C'est du lait cru, lequel n'est pas chauffé. Oui, on a introduit de merveilleuses techniques de filtration qui conservent un superbe goût de lait cru... mais qui  éliminent la flore sauvage. Le lait ? Il n'est pas cru, mais microfiltré. Et le fromage ? Ce n'est pas un fromage au lait cru, et il lui faut donc un autre nom... C'est tout simple quand on est honnête  : "fromage produit à partir de lait microfiltré".


Toute autre solution est déloyale !

vendredi 3 février 2017

L'écologie n'excuse pas tout !


Site Web :
www.afis.org
Contact :
communication@pseudo-sciences.org
Communiqué AFIS – Paris, le 3 février 2017
Opération anti-vaccination au Parlement Européen :
une députée
européenne invite un ex-médecin radié pour fraude
Le 9 février prochain, une initiative publique du m
ouvement anti-vaccination, accueillie par le groupe
écologiste, est
organisée au Parlement Européen et plus particulièr
ement par la députée française Michèle Rivasi [1].
Ce n’est pas certes la première fois que cette élue
ou d’autres utilisent ce lieu et cette tribune pou
r faire avancer des
idées rejetées par la communauté scientifique conce
rnée, on peut penser notamment aux initiatives de p
romotion
des travaux de Gilles-Eric Séralini sur les OGM ou
sur le glyphosate. Mais, c’est un nouveau cap qui v
ient d’être franchi
sur une question majeure de santé publique : en eff
et, l’invité d’honneur sera Andrew Wakefield, un ex
-chirurgien
radié pour avoir été convaincu de fraude scientifiq
ue. Il viendra présenter son film « Vaxxed : from c
over-up to
catastrophe » (vaccination : de la dissimulation à
la catastrophe).
En 1998, Andrew Wakefield publiait, sur commande et
sans déclarer le conflit d’intérêt ainsi créé, une
étude visant à
montrer la responsabilité du vaccin ROR (Rougeole,
Oreillons, Rubéole) dans l’apparition de cas d’auti
sme. Son
commanditaire, avocat au Royaume-Uni, souhaitait or
ganiser une action en justice collective contre les
fabricants de
vaccins ROR et avait besoin d’arguments scientifiqu
es. Le Docteur Wakefield a ainsi construit une étud
e destinée à
servir dans une procédure de litige lancée par 1600
familles. Cette étude a été depuis rétractée par l
a revue qui l’avait
publiée [2]. Pire, une fraude a été mise en évidenc
e, avec modifications de données. Pour cette étude
frauduleuse,
Andrew Wakefield touchera plus de 400 000 livres de
son commanditaire.
Depuis, le lien entre autisme et vaccination a été
complètement invalidé. Mais comme souvent, la fauss
e alerte a plus
marqué les esprits que ses démentis, aussi irréfuta
bles qu’ils puissent être. Aujourd’hui encore, un p
arent américain
sur quatre serait encore persuadé de cette fausse r
elation de cause à effet [3] et en France, la rumeu
r est plus que
tenace. Ainsi la couverture vaccinale recule, avec
le risque que cela implique en termes de propagatio
n de maladies
que l’on a pourtant les moyens de contrôler. Santé
Publique France a relevé, en 2011, au pic de la rec
rudescence,
15 000 cas de rougeole déclarés, avec parfois des c
omplications graves, voire des décès [5].
L’Association Française pour l’Information Scientif
ique (AFIS) rappelle que la politique de vaccinatio
n est un outil
majeur en santé publique et s’étonne que des adepte
s du « principe de précaution » puissent militer co
ntre la
vaccination en s’appuyant sur de la fausse science
et faire délibérément courir autant de risques inut
iles à la
population, notamment aux plus fragiles [4].
L’AFIS dénonce les dangers d’une initiative qui ali
mente des rumeurs complotistes, célèbre un ex-scien
tifique
convaincu de fraude et, par ses effets possibles, m
et en danger des populations en les incitant à ne p
as se prémunir
contre des risques pourtant maîtrisables.
[1] Sur Internet, on trouve des affiches mentionnan
t l’évènement au Parlement Européen, d’autres dans
une autre salle à Bruxelles quelques jours
plus tard, certains avec le logo du groupe écologis
te au parlement, d’autres sans. Par exemple :
http://initiativecitoyenne.be/2017/01/vaccins-leur-
surete-en-question-9-fevrier-au-parlement-europeen-
avec-michele-rivasi-pr-luc-montagnier-me-philippe-v
anlangendonck-sen
. Le journal américain
The Times dénonce aussi l'organisation de cet événe
ment :
http://www.thetimes.co.uk/edition/news/mmr-fraud-do
ctor-to-address-eu-event-
x2brwd2k3
[2] « Le rôle des lobbies anti-vaccins et les consé
quences d’une fraude médicale », Hervé Maisonneuve,
Science et pseudo-sciences
n’° 302, octobre
2012. www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2039
« L’affaire du docteur Andrew Wakefield : les faits
», Darryl Cunningham,
Science et pseudo-sciences
n° 317, juillet 2016. www.pseudo-
sciences.org/spip.php?article2713
[3]
www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/09/16/les
-vaccins-sont-ils-vraiment-dangereux-pour-la-sante_
4998681_4355770.html
[4] « Vaccination : peurs, rumeurs et obscurantisme
», Science et pseudo-sciences n’° 289, janvier 201
0. www.pseudo-
sciences.org/spip.php?article1288
« Questions sur la vaccination », Pierre Bégué, Sc
ience et pseudo-sciences n’° 289, janvier 2010. www
.pseudo-sciences.org/spip.php?article1306
« Vaccination, les « alertes » et leurs conséquenc
es », Science et pseudo-sciences n°291, juillet 201
0.
http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1466
[5] http://invs.santepubliquefrance.fr/Dossiers-the
matiques/Maladies-infectieuses/Maladies-a-preventio
n-vaccinale/Rougeole/Points-d-
actualites/Epidemie-de-rougeole-en-France.-Actualis
ation-des-donnees-de-surveillance-au-20-juin-2016