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jeudi 5 octobre 2023

Le combat pour la Raison : à ne jamais cesser, à amplifier


Pendant l'été, j'ai interrogé des personnes autour de moi à propos de leur "modèle intellectuel relatif à la constitution de la matière" : je mets cela entre guillemets parce que cela fait une bien difficile expression, bien abstraite.

Mais si vous vous  reportez au billet que j'avais écrit alors (https://hervethis.blogspot.com/2023/08/quel-modele-avons-nous-de-la-matiere.html), vous verrez que mes questions étaient extraordinairement pratiques et simples, compréhensibles : je voulais seulement savoir, concrètement, pratiquement, simplement, clairement,  comment des personnes de mon entourage se représentaient un cristal de sel ou de sucre, par exemple, ou la dissolution d'un tel cristal dans de l'eau.

J'avais été stupéfait de voir que même des personnes qui avaient fait des études supérieures n'avait en réalité aucune idée juste (ou fausse) de l'organisation de la matière.

De ce fait, je m'interroge sur leur place dans le monde : comment la voient-ils ? Comment perçoivent-ils les phénomènes ?

Jadis, on imaginait le monde peuplé de divinités, grandes ou petites, dieux, déesses, nymphes, gnomes, lutins, dryades, etc., qui auraient réglé l'apparence du monde : la pluie, la foudre, la surrection d'une montagne, le jaillissement d'une source, les crues d'une rivière...

D'ailleurs, il faut observer que la magie était constante et non seulement dans l'hypothèse de ces prétendus divinités mais aussi dans les relations qu'elles auraient entretenu avec les phénomènes visibles : par quelle "magie" les auraient-elles commandées ?

Des connaissances de chimie, de physique et de biologie donnent des clés pour comprendre tout cela...  à condition :
1. que l'on ait ces clés
2. que l'on sache les mettre en œuvre à bon escient.

Le second point est essentiel : savoir qu'un acide peut neutraliser une base, c'est bien, mais neutraliser effectivement un acide qui menace avec une base,  c'est mieux.

En quelque sorte, ces deux points structuraient l'Encyclopédie de Diderot, d'Alembert et leurs amis  : lutter contre les "tyrannies", par la connaissance technique, technologique et scientifique.  

La connaissance scientifique tout d'abord, ce sont bien les mécanismes des phénomènes.

Mais, comme dit, il faut les faire advenir en pratique, et c'est pour cette raison que les techniques et la technologie avaient leur place dans l'Encyclopédie.

Tout cela venait combattre donc les tyrannies, à l'époque, une royauté dévoyée, mais aussi une religion exagérément puissante : on n'oublie pas que Voltaire avait discuté largement de l'Inquisition, qui était encore présente.
Et l'on n'oublie pas non plus qu'à l'époque les charlatans étaient omniprésents :  rebouteux, prétendus guérisseurs par les herbes ou l'imposition des mains, sorciers de tous poils... 

Peu avant  l'Encyclopédie, Cyrano de Bergerac, le vrai, celui qui servit de modèle au roman d'Edmond Rostand, combattait déjà les sorciers  : " "On ne m'a quasi jamais relaté aucune histoire de Sorciers, que je n'aye pris garde qu'estoit ordinairement arrivée, à trois ou quatre cent liëues delà".

 

Aujourd'hui, avec des théories insensées, délirantes, hurluberlues, comme les croyances en un monde mu par des forces spirituelles (d'où la biodynamie, le spiritisme, la prétendue influence de la lune sur la croissance des plantes, les  prétendues énergies cosmiques, les prétendues vibrations énergétiques variées, les prétendus pouvoir de la Nature, les tables qui tourneraient, les fantômes, les feux follets, les feux de Saint Elme, les ectoplasmes, les extra-terrestres, les soucoupes volantes, les médecines les plus abracadabrantes, etc.) par exemple, on constate que le combat ne doit pas s'arrêter.
 

Trop de nos concitoyens croient naïvement à un fonctionnement spirituel du monde, alors que les sciences ne cessent d'en démontrer, au contraire, le fonctionnement "mécanique" (i.e. chimique, physique, biologique), et trop de charlatans vivent financièrement de ces lubies, profitant de la faiblesse intellectuelle d'autrui.

Et je fais maintenant le lien avec l'absence, chez de trop nombreux citoyens, de théories rationnelles de la matière  :  pour toutes celles et tous ceux qui n'ont pas les élémentaires connaissances chimiques, physiques ou biologiques, tout se vaut !
Pour ces personnes, il est tout aussi légitime de croire à des ondes cosmiques faisant pousser les haricots ou fermenter le vin dans les bouteilles qu'à n'importe quoi d'autres.
Ils sont ballottés au gré des idées les plus idiotes, les plus malhonnêtes, les plus folles, les plus insensées, les plus fausses... puisqu'ils n'ont pas les moyens de penser rationnellement, de faire le tri.  

Pour eux, pour tous ceux qui oublient que les sciences sont d'abord quantitatives et réfutables*, tout se vaut, et c'est la raison pour laquelle un grand combat pour la Raison doit être mené sans relâche.
C'est l'ignorance qui fait le lit de la charlatanerie et, a contrario, c'est l'enseignement qui doit équiper les citoyens, les débarrasser de la pensée magique qui afflige enfants et ignorants, qui doit en faire des citoyens capables d'éviter les lubies les plus variés, capables de ne pas confondre les faits et les idéologies : la négation des variations climatiques, les dangers exagérés de la vaccination, les influences des "ondes", les complots de tous ordres, et cetera.

C'est à l'école que tout se construit et c'est à l'école que les cours de sciences doivent commencer à être donnés avant de se poursuivre au collège, au lycée, à l'université et au-delà  !


* Je rappelle que la science n'est pas là pour "prouver", ou "démontrer", mais pour donner des théories quantitatives et réfutables, que les scientifiques s'évertuent à réfuter. Le mouvement essentiel est de se dire : "Si cette théorie était juste [on sait a priori qu'elle est insuffisante], alors cette expérience devrait aboutir à ce résultat particulier"

samedi 11 mai 2019

Méfions-nous de nos ignorances... et de l'information qui nous est donnée !



Il y a des raisons d'être optimiste : alors que des idéologues jouent les marchands de cauchemars, jusque dans une presse qui devrait être de service public, on voit des esprits raisonnables s'élever contre les mensonges délivrés publiquement. Cela fait chaud au coeur d'être dans une communauté rationnelle !
Mais il est encore plus merveilleux de voir des collègues plus jeunes se lancer dans le salutaire combat de la Raison : tout n'est pas perdu, bien au contraire.
Cette introduction générale pour partager avec mes amis un message reçu après une conférence que j'avais eue le plaisir de faire à l'Ecole de chimie de Rennes, par un étudiant de première année, et que je livre (avec son accord) :

Récemment, j'ai pu mener une petite expérience "sociale" sur quelques camarades de promo. Avec deux autres étudiants, nous devions préparer un exposé pour un cours d'anglais. Le hasard faisant que l'exposé allait se passer le 1er avril, j'ai proposé à ceux qui faisaient l'exposé avec moi de parler de science dans les médias.
Nous avons donc présenté à la classe trois sujets controversés dans les médias, en leur expliquant qu'au vu de la date particulière, nous allions leur présenter des arguments volontairement erronés, et qu'ils devraient les trouver pendant la présentation, puis nous les donner à la fin de celle-ci.
Nous avons donc présenté des arguments contre les vaccins, contre les ogm, et contre le glyphosate. Ce que la classe ignorait, c'est que l'intégralité des arguments que nous proposions étaient faux. A la fin, ils ont rebondi sur les vaccins et un peu sur les ogm, pensant avoir trouvé tous les pièges. Nous avons donc confirmé l'absence de risque pour les vaccins et les ogm sur la santé.
Je leur ai ensuite posé la question : "Qui savait, avant l'exposé, que le glyphosate donnait le cancer ?" (j'ai volontairement utilisé le verbe "savoir" pour qu'ils soient moins hésitants sur la réponse, le but étant de les interpeller sur leurs erreurs). Les trois quarts ont levé la main. Puis, j'ai repris et démonté tous les arguments que je leur avait auparavant présenté contre le glyphosate (j'ai simplement repris ceux d'Envoyé Spécial).
Ils furent très réceptifs et personne ne s'est offusqué, bien que quelques approfondissements furent demandés. Notre professeur d'anglais a alors très justement dit : "Si une classe de scientifiques comme celle-ci peut se construire un avis complètement erroné sur un sujet, simplement parce qu'ils ont été influencés par les médias qui se fichent des faits scientifiques, comment une personne normale a-t-elle la moindre chance de détecter des tromperies présentées comme scientifiques ?".
Cette question n'a probablement pas de réponse, mais peut-être qu'il existe des pistes pour résoudre le problème qu'elle soulève : comment rendre les gens moins crédules face à tout ce qui les choque dans les médias, et comment leur (re)donner confiance en la science ?"


Ce message est d'autant plus réconfortant que, lorsque j'étais à l'Ecole de chimie de Rennes, une classe de lycéens de Concarneau avait été récompensée pour un travail montrant qu'il n'existait pas de lien entre vaccination et autisme : merveilleux professeurs que ceux qui avaient encadré les élèves !

mardi 12 février 2019

Que fait la science ? De la connaissance ? De la rationalité ?


Pendant longtemps, j'ai clamé un vigoureux "Vive la connaissance", tandis que j'écrivais souvent que "la science étend le royaume du connu".
Mais une nouvelle occasion de dire cela me donne la possibilité de m'arrêter, et de réfléchir à mon enthousiasme... que je trouve naïf et déplacé.

Non pas que l'enthousiasme messied, mais c'est sa lettre qui m'arrête. En effet, dans la mesure où la science propose des théories insuffisantes qu'elle précise, le royaume de la connaissance ne s'étant pas : notre ancêtre qui a la théorie d'une ondine qui fait déborder une rivière n'a pas moins de connaissance que nous qui pensons que le débit augmente parce qu'il a plu en amont, par exemple ; c'est seulement une interprétation différente, et il y a lieu de penser que la nôtre est plus opérative, puisqu'elle est prédictive. De même, notre ancêtre qui qui croit qu'un dieux du ciel envoie la foudre n'a pas moins de connaissance, en termes de quantité, que nous qui pensons à des charges électriques et à des arcs entre des zones chargées de l'atmosphère.
Oui, ce n'est pas plus de connaissance, mais des connaissances différentes, plus assurées.



Plus fondamentalement, et puisque nos connaissances sont révisables, c'est moins la nature de la connaissance qu'il faut donc considérer. La science, elle, contrairement à la croyance, est testable. Ce que disait Galilée quand il prônait l'expérience contre l'autorité ! Et l'expérience s'articule avec la connaissance produite par la logique, la rationalité.
Oui, ce n'est pas la connaissance, que je cherche à promouvoir, mais bien cette rationalité, fondée sur de la rigueur. D'ailleurs, dans la vie courante on gagne à parler d'approche rigoureuse, plus que d'approche scientifique. L'approche scientifique, elle, est réservée aux scientifiques, et je l'ai déjà tellement souvent exposé que je renvoie aux billets correspondants.
Oui, il ne faut pas galvauder la science si on veut la promouvoir efficacement.

Mais, j'y reviens : que clamer, avec beaucoup d'énergie  ? Je propose un "Vive la raison, vive la rationalité !" 

samedi 9 février 2019

"Naturellement chimique" : un bon combat avec de mauvais mots


Nous sommes bien d'accord : il faut absolument combattre les peurs irrationnelles, car elles conduisent à des décisions absurdes, et, dans la communauté nationale (ou internationale), cela peut être grave, ou gênant. 
Ces temps-ci, le public a parfois peur de son alimentation, au point que des journalistes (qui ne sont en réalité que des ambassadeurs du public, sans plus de connaissance) en rajoutent, tandis que quelques malhonnêtes manipulent la communauté, idéologiquement ou commercialement.
Et puis, la Raison veut que l'on combatte pour plus de Lumières, n'est-ce pas ? Diderot et ses amis parlaient de "tyrannie", et c'est bien de cela dont il est question : d'obscurantisme. On évoquant des fées ou des sorcières pour les phénomènes que l'on ne comprenait pas, mais la science moderne a mis de l'ordre dans tout cela, et elle n'a pas fini. Plus généralement, le combat des Lumières est loin d'être terminé !

La "chimie", notamment, fait l'objet de discussions idiotes, au "café du commerce" moderne que sont les réseaux sociaux. Il faut pourtant dire que la  chimie est une science de la nature, qui produit de la connaissance. 
Bien sûr, son application peut faire des poisons (ou des médicaments), mais ce n'est pas la chimie qui est responsable de ces produits : l'arbre n'est pas le fruit, comme le disait bien Louis Pasteur !
Dans ce contexte, la Société française de chimie (qui ne sais pas parler français puisqu'elle se nomme "Société chimique de France") veut mener une action qu'elle intitule "naturellement chimique". Le combat est bon : il faut, comme dit plus haut, expliquer au public ce qu'est cette chimie qu'il contribue à développer par ses impôts. Pour autant, le dictionnaire, qui fait loi en matière de définition, indique que le naturel est ce qui ne fait pas l'objet d'une intervention humaine. Autrement dit, l'eau de pluie est naturelle, mais pas l'eau en bouteille -même si elle avait  la même composition-, puisqu'il a bien fallu que quelqu'un capte l'eau, et la mette en bouteille.
Alors... naturellement chimique ? Puisque la chimie est une science, donc toute humaine, il n'y a pas de produits "naturellement chimiques". Et il ne reste qu'une possibilité, pour comprendre sans faute le "naturellement chimique" : l'interpréter comme un "évidemment chimique" (avec donc un usage très rhétorique du mot "naturellement", qui est en l'occurrence très mal venu).
Reste qu'il ne faudra pas confondre la chimie, science, et ses applications. Je répète que l'industrie qui fait usage de la chimie, des connaissances produites par les scientifiques que sont les chimistes, n'est pas une "industrie chimique", puisqu'elle ne fait de la science, mais de la technologie !

mercredi 4 avril 2018

Quelle stratégie ?

Un de mes amis se lamente que le public français doute de la science. Il se fonde sur un sondage publié par un grand quotidien national... et je l'interroge, tout d'abord, avant de discuter les idées qui ressortent du sondage : pourquoi le sondage a-t-il été produit ? Qui l'a produit ? Comment a-t-il été produit ? Pourquoi ses résultats sont-ils publiés en ce moment-même ?
En effet, je ne suis plus assez naïf pour croire que ce sondage soit venu sans intention, et je propose de bien interroger les circonstances, parce que nous risquons d'avoir des surprises : le monde de la communication est plein d'ambitieux, de malhonnêtes, d'idéologues... qui cherchent à nous influencer dans une direction qui les arrange.

Et, n'ayant pas les réponses à ces questions, je refuse absolument de discuter avec mon ami : ne cherchons pas à savoir la couleur des carrés ronds... puisque ces objets n'existent pas.

Pour autant, je suis heureux de discuter avec mon ami, intelligent et soucieux du bien collectif, parce que cette discussion me permettra de mieux de voir la tache aveugle de mes yeux... moi qui ne voit rien qu'un militantisme actif, même si je l'hybride avec des réflexions stratégiques. Oui, j'ai décidé d'être un "hussard de la connaissance", parce que je suis convaincu (une idée, pas une opinion molle) que c'est la clé des Lumières.

Et, en matière de stratégie de communication, en vue d'introduire plus de loyauté et de rationalité dans les débats publics, tout me ramène à un débat, sur une grande chaîne de télévision nationale, contre un "biologiste" (disons plus justement qu'il discutait de questions d'histoire naturelle)  malhonnête, lequel vendait  ses livres en même temps que l'idée des pouces verts, l'homéopathie, la mémoire de l'eau... 
J'ai compris ce jour là que je  n'avais qu'une possibilité : pour montrer quelque chose d'aussi chatoyant que mon opposant foireux (malhonnête), je devais montrer de l'expérience, encore de l'expérience, et toujours de l'expérience, d'où le style de mes conférences (en général), d'où le style de mes cours...
Et ces expériences doivent être les plus amusantes de la chimie... même quand elles n'ont rien à voir avec le sujet traité : c'est de la crédibilité que l'on gagne en montrait de véritables faits  : Jean de la Fontaine disait "Si Peau d'Âne m'était conté, j'y prendrais un plaisir extrême"... et il est vrai qu'amuser mes interlocuteurs permet de gagner du crédit, d'établir les faits (expérimentaux)... et de faire passer des messages rationalistes supplémentaires. Cela, plus beaucoup de gentillesse (le summum de l'intelligence, c'est la bonté et la droiture), beaucoup d'énergie, cela fera mon compte.
Un détail, d'ailleurs : en écrivant "rationaliste", je viens d'hésiter... parce que cela serait très mal ? Au contraire, c'est essentiel, car c'est seulement ainsi que l'on fera advenir ces Lumières qui permettent de lutter contre les tyrannies et les malhonnêtetés.
Soyons des Hussards de la connaissance !

dimanche 14 août 2016

La Raison


Depuis des mois, des années, je fait l'apologie des Lumières, de la rationalité et de la Raison. La Raison ? Sutor non supra crepidam : le cordonnier, dit-on, ne juge pas plus haut que la chaussure, et je risque de ne pas aller bien loin, moi qui ne suis pas philosophe de profession.

Après cette introduction, je dois commenter ce que je viens de dire, en commençant par préciser que je ne veux évidemment pas mépriser le cordonnier, car l'homme n'est pas un ustensile, comme le disait  justement Confucius : nous ne sommes pas réductibles à notre métier, et tel "boulanger" sera également organiste, tel électricien sera chanteur d'opéra. La phrase latine me sert surtout à dire publiquement que, à un moment donné de mon existence, je ne peux que difficilement faire mieux que ce que je fais. Ou alors, au prix d'un effort particulier. Il faudra un travail de fond pour cesser d'être "cordonnier" pour devenir... chapelier ;-).
J'y reviens, d'autre part : je veux aussi me souvenir modestement que je ne suis pas philosophe, à moins d'être ce que le physico-chimiste britannique  Michael Faraday et d'autres nommaient un  "philosophe naturel", puisqu'ils désignaient par philosophie naturelle ce que nous nommons aujourd'hui les sciences de la nature.
Mais ce serait tordre le bras à la langue actuelle, et j'y reviens, je ne suis pas philosophe. De ce fait, je risque de pêcher par ignorance, quand j'utilise des mots que les philosophes ont connoté, détourné, accaparé... Par exemple, "expérimentalisme" : je ne peux plus l'utiliser pour désigner une façon de penser la science qui serait fondée sur l'expérience, puisque John Dewey, par exemple, lui donna un sens particulier, et que l'on risque de m'opposer ce sens (sans compter que le mot fut utilisé pour désigner un courant littéraire, notamment).

 Alors, raison ? Puis-je décemment en parler ? Je propose d'oublier que  les mots font aussi partie d'un corpus partagé, qui commence dans les (bons) dictionnaires.
Le mot raison vient du latin ratio, qui désigne une « mesure », un « calcul », la « faculté de compter ou de raisonner », une « explication ». En mathématiques, c'est le « rapport entre deux nombres ». Il s'agit donc bien du sens primordial de « mesure », de « comparaison. » L'homme doté de raison, de rationalité, est donc celui qui possède l'art de la mesure ou plus encore l'art de faire une comparaison mesurée avec précision. Cette comparaison s'opère au moyen de l'intellect, mais davantage encore, au moyen d'instruments de mesure.

mardi 3 novembre 2015

Le Ragnarok, toujours le Ragnarok

Ce matin, un message d'un correspondant :


Bonsoir et merci beaucoup de nous avoir fait parvenir l’article sur l’enseignement dans les universités médicales !
Ayant travaillé longtemps dans l’ADFI pour aider les familles de victimes de sectes et en étant un fidèle lecteur de la revue SCIENCES et PSEUDOSCIENCES, de l'AFIS, je suis très sensible à ces sujets.
Toute la journée dans mon cabinet je suis confronté à ces discours et au bout de 30 ans de métier c’est usant ! Mais ce qui est vraiment triste c’est de voir combien plus la connaissance scientifique augmente, et plus la diffusion de l’irrationnel progresse, et donc la crédulité !

Alors je crois à la stimulation de l’esprit critique que je fais auprès de mes petits enfants mais aussi parfois dans les collèges muni de mon doppler, appareil d’échographie…
Vous avez réussi à faire évoluer les choses dans le domaine de la cuisine, si un jour on pouvait arriver à cela avec la médecine !...


La réponse à donner est claire : elle s'apparente à celle que j'avais faite à mon ami administrateur de l'agriculture : luttons contre le Ragnarok.
A propos de crédulité, de superstition, d'irrationnel, de pensée magique donc, il faut d'abord se souvenir de l'échange qui avait lieuà l'Unesco, il y a plusieurs années, entre deux ministres de la recherche scientifique :  le ministre français se  plaignait à son homologue d'un pays en voie de développement de la forte proportion de Français superstitieux... mais son interlocuteur lui  répondait que, chez lui, cette proportion atteignait 95 pour cent.  Tout ce travail de diffusion des résultats de la science, de vulgarisation scientifique, d'enseignement à l'école des résultats et des méthodes des sciences porte donc ses fruits,  et il n'y a aucune raison d'être découragé.
Comme expliqué dans un billet précédent, des vagues enfant arrivent par millions chaque année avec la pensée magique,  et ce serait désastreux de ne pas lutter régulièrement, assidûment, contre la  pensée magique.  Dans la mythologie alsacienne, le dieux Wotan ne cesse de rôder sur les champs de bataille pour récupérer des guerriers valeureux, qu'il conduit au Valhalla, afin de repousser les assauts des géants. De même, nous devons militer pour que des amis de plus en plus nombreux s'associent à nous  pour faire régner la Raison.
D'ailleurs,  pour ceux qui se lasseraient, qui se désespéreraient, j'ai une proposition merveilleuse,  à savoir que si l'on est activement occupé à combattre contre les Géants, alors on  n'a plus le temps, la liberté d'esprit, de chercher à connaître l'efficacité de nos actions. N'écoutons pas les sirènes, et utilisons tout notre temps pour déterminer les meilleurs techniques de lutte contre l'irrationnel. Certainement l'enseignement des sciences dans les écoles,  les collèges et lycées est essentiel, et je propose de penser que cet enseignement n'est jamais trop tôt, ni jamais suffisant !
Nous devons chercher activement des moyens de lutte !  Sans nous lasser, luttons contre le Ragnarok !


Le Ragnarok, toujours le Ragnarok

Ce matin, un message d'un correspondant :


Bonsoir et merci beaucoup de nous avoir fait parvenir l’article sur l’enseignement dans les universités médicales !
Ayant travaillé longtemps dans l’ADFI pour aider les familles de victimes de sectes et en étant un fidèle lecteur de la revue SCIENCES et PSEUDOSCIENCES, de l'AFIS, je suis très sensible à ces sujets.
Toute la journée dans mon cabinet je suis confronté à ces discours et au bout de 30 ans de métier c’est usant ! Mais ce qui est vraiment triste c’est de voir combien plus la connaissance scientifique augmente, et plus la diffusion de l’irrationnel progresse, et donc la crédulité !

Alors je crois à la stimulation de l’esprit critique que je fais auprès de mes petits enfants mais aussi parfois dans les collèges muni de mon doppler, appareil d’échographie…
Vous avez réussi à faire évoluer les choses dans le domaine de la cuisine, si un jour on pouvait arriver à cela avec la médecine !...


La réponse à donner est claire : elle s'apparente à celle que j'avais faite à mon ami administrateur de l'agriculture : luttons contre le Ragnarok.
A propos de crédulité, de superstition, d'irrationnel, de pensée magique donc, il faut d'abord se souvenir de l'échange qui avait lieuà l'Unesco, il y a plusieurs années, entre deux ministres de la recherche scientifique :  le ministre français se  plaignait à son homologue d'un pays en voie de développement de la forte proportion de Français superstitieux... mais son interlocuteur lui  répondait que, chez lui, cette proportion atteignait 95 pour cent.  Tout ce travail de diffusion des résultats de la science, de vulgarisation scientifique, d'enseignement à l'école des résultats et des méthodes des sciences porte donc ses fruits,  et il n'y a aucune raison d'être découragé.
Comme expliqué dans un billet précédent, des vagues enfant arrivent par millions chaque année avec la pensée magique,  et ce serait désastreux de ne pas lutter régulièrement, assidûment, contre la  pensée magique.  Dans la mythologie alsacienne, le dieux Wotan ne cesse de rôder sur les champs de bataille pour récupérer des guerriers valeureux, qu'il conduit au Valhalla, afin de repousser les assauts des géants. De même, nous devons militer pour que des amis de plus en plus nombreux s'associent à nous  pour faire régner la Raison.
D'ailleurs,  pour ceux qui se lasseraient, qui se désespéreraient, j'ai une proposition merveilleuse,  à savoir que si l'on est activement occupé à combattre contre les Géants, alors on  n'a plus le temps, la liberté d'esprit, de chercher à connaître l'efficacité de nos actions. N'écoutons pas les sirènes, et utilisons tout notre temps pour déterminer les meilleurs techniques de lutte contre l'irrationnel. Certainement l'enseignement des sciences dans les écoles,  les collèges et lycées est essentiel, et je propose de penser que cet enseignement n'est jamais trop tôt, ni jamais suffisant !
Nous devons chercher activement des moyens de lutte !  Sans nous lasser, luttons contre le Ragnarok !
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mardi 8 avril 2014

Un 1er avril révélateur…


   

Un changement de gouvernement le 1er avril ? L'occasion était trop belle... et j'ai annoncé que notre nouveau premier ministre avait besoin de moi à ses côtés, pour la science et l'enseignement supérieur.

Certains ont apprécié l'invitation, m'ont félicité ; d’autres m'ont fait reproche d'avoir accepté, et d’autres enfin n'ont pas eu le temps de se rendre compte de l'énormité : comment pourrait-je administrer, alors que je me gouverne à peine ? Comment irais-je diriger un pays, alors que je récuse bien souvent les prétentions de compétences à le faire ? Les commentaires sur Twitter ont été amusants : "Ah, dommage, vous n'aurez plus le temps de venir au colloque auquel je voulais vous inviter", ou "Vous allez dans le mur"...
Les remarques de personnalités en charge de responsabilité, aussi, ont été amusantes... et le fait que mon annonce n'ait pas été prise pour un poisson d'avril en dit long sur le crédit que l'on me porte, sur le bord politique que l'on me prête, sur les ambitions que je pourrai (je dis bien "pourrai") avoir, sur mes "relations"...
C'est beaucoup trop d'honneur, pour quelqu'un qui cherche seulement à "clarifier", à chercher les mécanismes, à comprendre, à faire rayonner un peu de Lumières, à promouvoir une peu plus de rationalité. 
Pardon à tous ceux qui m'ont cru pendant plus de quelques secondes.

mardi 16 avril 2013

Les Lumières

"Les Lumières, c'est la sortie de l'homme hors de l'état de tutelle dont il est lui-même responsable. L'état de tutelle est l'incapacité de se servir de son entendement sans la conduite d'un autre. On est soi-même responsable de cet état de tutelle quand la cause tient non pas à une insuffisance de l'entendement mais à une insuffisance de la résolution et du courage de s'en servir sans la conduite d'un autre. Sapere aude ! Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! Voilà la devise des Lumières."

(Emmanuel Kant, Qu'est-ce que les Lumières, 1794, cité parMichel Foucault, Dits et Ecrits, tome IV, Gallimard, 1984, 562-578)