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jeudi 3 février 2022

La crêpe ? C'est très simple... et très compliqué

 La crêpe ? C'est très simple... et très compliqué

Je m'aperçois que je n'ai peut-être pas bien décrit la formation des crêpes.

Le mécanisme essentiel est le gonflement des grains d'amidons chauffés dans de l'eau, l'interprénétration de grains voisins, puis un peu d'évaporation d'eau.

Oui, à la base,  il y a donc des grains d'amidon, qui viennent de la farine ou de la fécule.
Et cette farine peut être de blé, de sarrasin, de riz... On peut utiliser une farine ou une fécule (de maïs, de pomme de terre)...

Ces grains d'amidon, chauffés dans l'eau, gonflent considérablement au point de s'interpénétrer.

Ce qui produit  une couche continue, gonflée,  qui,  en séchant un peu, formera la crêpe.

Mais je n'ai pas expliqué le mécanisme de ce gonflement qui a pour nom "empesage de l'amidon".

A cette fin, il est bon de savoir que les grains d'amidon sont organisés en couches concentriques, comme les cernes d'un tronc d'arbre.

Ces cernes, ces couches concentriques, sont composés de deux sortes de molécules :
- des molécules d'amylopectine : ramifiées, comme des arbres
- des molécules d'amylose : linéaires, comme des fils.

Dans les deux cas, ces molécules sont faites de maillons enchaînés qui sont essentiellement ce que l'on nomme des "résidus de glucose", c'est-à-dire des molécule de glucose qui ont perdu quelques atomes en réagissant, lorsqu'elles se sont enchaînées.

Ces arbres et ces fils sont imbriqués dans les couches concentriques des grains amidon, mais quand on chauffe les grains d'amidon dans l'eau, alors les "fils"  peuvent migrer vers la solution, tandis que les arbres restent en place et que les molécules d'eau s'introduisent dans les grains, entre les "arbres".

De la sorte, comme de l'eau rentre et que la structure des grains est défaite par la perte des "fils", les grains d'amidon gonflent.

Évidemment, ce n'est pas du tout ou rien : il y a des molécules d'amylose qui restent dans la structure concentrique, il y a des arbres qui en partent, mais ce que j'ai décrit est un  mouvement général.

Quand des grains voisins gonflent jusqu'à se rencontrer, alors les arbres s'interpénètrent,  s'enchevêtrent, et cela forme une couche qui devient continue avec essentiellement les arbres et de l'eau.

Puis,  quand l'eau s'évapore, alors il reste une couche continue avec moins d'eau, plus forte, plus solide,  et c'est cela, une crêpe.

samedi 16 octobre 2021

En avant première, les mécanismes de formation des crêpes

Voici ce qui sera probablement expliqué bientôt à la télévision, dans C'est pas sorcier... puisque cela vient de moi : 



Au fond, les mécanismes qui engendrent les crêpes à partir de la pâte à crêpes sont simples.
Considérons une pâte à crêpes faite d'oeufs, de farine et de lait.
- le lait, au premier ordre,  c'est de l'eau, avec de la matière grasse dispersée;
- l'oeuf apporte de l'eau, à nouveau, mais également des protéines, qui sont initialement comme de microscopiques pelotes;
- et la farine apporte essentiellement des grains insolubles dans l'eau, que l'on nomme  des grains d'amidon. Quand on mélange les trois ingrédients, on a de l'eau, qui fait une phase continue, avec des protéines en solution, et des grains d'amidon en suspension, plus des gouttelettes de matière grasse.

Quand on chauffe, les protéines de l' œuf se déroulent et s'attachent en a un réseau qui s'étend dans tout le volume de la crêpe, comme quand on cuit du blanc d'œuf. Et ce réseau donne donc de la cohésion au liquide. Toutefois, à ce "gel" de protéines s'ajoute l'empesage de l'amidon : cela signifie que, dans l'eau chaude, les grains d'amidon gonflent en absorbant l'eau environnante. Ils gonflent même tant  qu'ils finissent par s'interpénétrer et se souder. C'est donc un deuxième mécanisme qui donne de la solidité à la crêpe, et permet notamment de la retourner.



Il y a de nombreuses questions qui demeurent, comme de savoir pourquoi les deux face de la crêpe ne sont pas identiques. C'est pourtant simple  : quand ton cuit la première face, la crêpe est encore liquide, de sorte que l'eau qui s'évapore au contact de la poêle chaude forme de la vapeur, qui arrive à traverser le liquide, créant de petits trous.
La base de la crêpe cuit en premier, puis la cuisson va jusque au sommet.
Quand on retourne la crêpe, on ne cuit plus un liquide, mais un solide et cela est bien différent, car l'eau qui s'évapore au contact de la poêle n'a plus la possibilité de traverser la crêpe , car celle-ci n'est plus liquide ; elle  soulève donc la crêpe, forme des cloques et c'est ainsi que l'on a des parties au contact de la poêle et des parties qui ne sont pas au contact de la poêle, d'où des différences de couleurs et de degrés de cuisson.

vendredi 18 septembre 2020

Un gâteau se fend au centre lors de la cuisson ? Rien que de parfaitement normal quand on comprend le phénomène.

science/études/cuisine/politique/Alsace/gratitude/émerveillement

 

1. Nous cuisons un gâteau dans un moule rectangulaire allongé, et nous le voyons se bomber à la cuisson, mais se fendre par le centre, selon la longueur. Peut-on l'éviter ? Faut-il l'éviter ?

2. Considérons en effet que l'appareil à gâteau est une préparation assez molle, surtout si l'on y a mis du blanc d' œuf battu en neige, mais retenons surtout qu'elle contient de l'eau.

3. Quand le gâteau est chauffé, il subit plusieurs modifications. Par le dessus, l'eau s'évapore et forme une croûte, selon le bon "commandement" selon lequel un produit alimentaire qui contient un liquide est mou, alors qu'il est dur quand il n'en contient pas. La croûte, c'est tout (la farine, les protéines de l'oeuf, du sucre) sauf l'eau qui s'est évaporée.

4. Il y a aussi une formation de croûte, au contact des bords du moule, parce que ceux-ci sont rapidement très chauds. Au début de la cuisson, l'appareil (la préparation) colle aux parois, tout comme de la viande que l'on fait sauter commence par attacher à la poêle. Mais ensuite la croûte se forme, parce que l'eau de cette partie s'évapore, formant des bulles de vapeur que l'on peut voir crever.

5. Et toute la vapeur évaporée par le fond et par les parois se retrouve plutôt au centre, soulevant la partie supérieure du gâteau: l'ordre de grandeur à bien conserver, c'est qu'un gramme d'eau fait environ un litres de vapeur et qu'un gâteau de 100 grammes perd environ dix grammes, soit dix litres de vapeur !

6. Bref, la vapeur d'eau formée dans le moule soulève les couches du gâteau vers le haut, créant le bombé initial.

7. Mais ce n'est pas tout  : la vapeur doit s'échapper. Or elle ne peut pas s'échapper par les bords,  de sorte qu'elle s'échappe nécessairement par le centre, d'où l'espèce de fissure centrale dans le gâteau, là où le bombé est le plus fragile.

8. Peut-on l'éviter ? Certainement  : si l'on évite ces bulles, notamment en cuisant au four à micro-ondes, par exemple, ou en chauffant par le haut, ou en faisant une croûte initiale suffisamment résistante, celle-ci ne fissurera pas.

9. Mais faut-il l'éviter ? Pas certain : c'est si engageant, de voir l'intérieur tendre du gâteau à travers la croûte !






mercredi 24 janvier 2018

Je ne suis pas cuisinier !

Une question, ce matin, mais qui, en réalité, aborde deux points :
- mon statut
- la cuisson dans les fours à micro-ondes.

La voici: 

Pour notre TPE, nous avons décidé d'étudier l’action du four à micro-ondes sur les aliments. Cependant nous avons beaucoup de mal à trouver des informations pertinentes, alors nous avons pensé à nous adresser à vous étant donné que vous êtes physico-chimiste et en plus cuisiner.
En tant que cuisinier conseilleriez-vous ou non la cuisson au four à micro-onde, et pourquoi? Et en tant que physico-chimiste votre avis changerait-il? Pourriez vous également nous expliquez pourquoi nous ne pouvons obtenir une cuisson saignante après avoir cuit un rôti au four à micro-ondes? D’après nos recherches cela est dû au fait que la propagation de la chaleur se fait de l'intérieur vers l’extérieur mais certains parlent de la réaction de Maillard, cependant nous n’arrivons pas à comprendre cette réaction.


A propos de mon statut

Avant d'évoquer les micro-ondes, je prends la précaution d'indiquer que je ne suis pas cuisinier ! Bien sûr, je cuisine chaque jour, pour nourrir ma famille, et je prétends bien connaître les techniques culinaires, puisque je suis capable de battre le record mondial du plus gros volume de blanc en neige à partir d'un seul blanc d'oeuf (plus de 40 litres), mais c'est comme si je disais que je suis musicien parce que je joue en amateur d'un instrument : non, je ne suis pas "musicien" de mon état.
Surtout,  on trouvera dans mon livre "La cuisine, c'est de l'amour, de l'art, de la technique" (Editions Odile Jacob, Paris) l'explication : comme le dit le titre de ce livre, être cuisinier (professionnel), c'est maîtriser la technique, l'art  (le "bon", c'est le beau à manger),  et lien social qui sous tend l'acte de cuisiner (pour des clients).



Personnellement, je ne suis pas un artiste, et je ne suis pas certain d'être très bon pour ce qui est de l'amour, disons le lien social, moi qui ai le plaisir d'être seul devant mes équations, au laboratoire.
J'insiste un peu : mon métier n'est pas la cuisine, mais l'exploration physique et chimique des phénomènes qui surviennent lors des transformations culinaires... et à ce titre la cuisson par les micro-ondes est intéressantes, car comment les ondes se propagent-elles ? Quelles réactions physiques ou chimiques engendrent-elles ? Et, surtout, des mécanismes inédits sont-ils à découvrir ? Voilà la gastronomie moléculaire posée. 




Puis à propos de cuisson par les micro-ondes

Donc conseiller de cuisiner au four à micro-ondes ? La question me semble mal posée, et je propose de toujours demander d'abord  : quel est l'objectif  ?
Et puis, ce n'est pas vrai que l'on ne peut pas obtenir une viande saignante au four à micro-ondes, surtout depuis que ces fours sont équipés de résistances qui peuvent griller : il suffit de chauffer suffisamment peu.
Mais nous sommes allés trop vite, et cela vaut la peine de se demander pourquoi on cuit  : pour l'assainir microbiologiquement, en tuant les micro-organismes de surface et les éventuels parasites intérieurs (porc, cheval...) ; pour changer la consistance (attendrir des carottes) ; pour donner du goût.
Pour les micro-ondes, il n'est pas vrai que la propagation de la chaleur se fait de l'intérieur vers l'extérieur : les micro-ondes sont des ondes qui traversent les tissus végétaux et animaux, et sont absorbées par l'eau qui constitue ces tissus, notamment. L'énergie est déposée partout.

Quant à la réaction de Maillard, on trouvera un texte de synthèse sur https://www.academie-agriculture.fr/publications/notes-academiques/n3af-2016-3-actes-de-colloques-maillard-products-and-maillard. On y verra que le nom "réactions de Maillard" est utilisé très abusivement, et qu'il doit être réservé à des réactions de brunissement non enzymatique entre des protéines et des sucres réducteurs (glucose, fructose, par exemple). Ce n'est qu'un exemple des réactions de brunissement des aliments, à côté d'oxydations, de déshydratations, de pyrolyse, de thermolyse, etc. Et il y en a, lors des cuissons au four à micro-ondes, même s'il y en a moins que dans des grillades.


Mais toute cette réponse ne vaut rien pour un TPE : il faudra que nos amis aillent en ligne, sans doute sur Google Scholar ou dans des manuels, pour avoir des réponses "attestées" par des références.















Vient de paraître aux Editions de la Nuée Bleue : Le terroir à toutes les sauces (un traité de la jovialité sous forme de roman, agrémenté de recettes de cuisine et de réflexions sur ce bonheur que nous construit la cuisine)

jeudi 4 août 2016

Quel est le mécanisme ?

 Quel est le mécanisme ? Ou bien,  quels mécanismes? C'est la question principale, celle qui est écrite sur le mur de mon laboratoire dans les caractères les plus gros.
C'est la question principale,  parce que c'est la question principale  des sciences de la nature : nous cherchons les mécanismes des phénomènes. Tout ce que nous faisons vise à identifier les mécanismes des phénomènes, et, alors que cette quête est très difficile, nous ne devons pas faiblir, c’est-à-dire nous arrêter aux  caractérisations quantitatives, ou à la réunion des données en lois. Non, il faut aller plus loin et passer des équations aux explications : quel est le mécanisme ?
Bien sûr, les propositions théoriques sont nécessairement suivies de recherche de conséquences des théories et de tests expérimentaux de ces conséquences, mais alors l'objectif restera encore de chercher un mécanisme mieux approprié que le précédent. Décidément, la question de sciences de la nature est : quel est le mécanisme ?
J'ai évoqué des faiblesses, des lassitudes … Et il est vrai que parfois,  il est bien difficile de produire des données expérimentales, puis de les réunir en lois. Après avoir lutté avec les matériels d'analyse, les échantillons, on est souvent heureux d'avoir enfin nos "lois", c'est-à-dire des équations qui relient les paramètres expérimentaux, et c'est pour cette raison que tant d'entre nous s'arrêtent à cela, mais la science ne vise pas seulement des caractérisations quantitatives, et c'est donc bien une difficulté que de passer de ces dernières à des théories,   des modèles, des explications du monde, en conséquence. Oui, quel est le mécanisme ?

Reprenons, en nous répétons un peu (pas trop quand même), comme si nous n'avions encore pensé à rien : quels sont les mécanismes ?
Cette question est la question centrale de la science, puisque la définition de cette dernière est de chercher les mécanismes ces phénomènes, par une méthode particulière qui consiste en l'observation, l'identification précise d'un phénomène, sa caractérisation quantitative (on "mesure" le phénomène), puis la réunion des  résultats de ces caractérisations (« mesures ») en lois synthétiques (c'est-à-dire en équations), puis, par induction, la recherche de mécanismes quantitativement compatibles avec ces lois, puis la recherche de  conséquences théoriques de ces « théories », puis le tests expérimental de ces conséquences théoriques.
Au coeur de l'activité scientifique,  il y a donc les mécanismes, ces « explications » des phénomènes (on pourrait remplacer « explication » par « compte rendu »), par l'introduction de nouveaux concepts, notions, objets, qui découlent des lois.
Ces notions, concepts, objets sont « imaginés », mais pas  imaginés comme on imagine des fées ou des lutins. Non, en quelque sorte imaginés "obligatoirement", à savoir que les notions, concepts ou objets que nous introduisons (en nombre aussi petit que possible : il faut se souvenir du principe d'Occam, selon lequel les explications doivent être économes) doivent obéir aux lois identifiées.
 Par exemple, quand on explore le passage du courant électrique dans un matériau conducteur, on est conduit à imaginer l'existence d'entités nommées électrons, que l'on apprend à caractériser par une masse, une charge électrique, un spin…  Auparavant, on avait deux sortes d'électricités, positive et négative, mais on a réduit tout cela à la présence des électrons.
Plus profondément, l'activité scientifique est tout entière dans la recherche des mécanismes, parce que la recherche scientifique a pour but de comprendre comment le monde fonctionne, « comment ça marche ». Oui, alors que nous sommes engagés dans des travaux variés, de caractérisation quantitative des phénomènes, dans l'identification précise de ces derniers, dans la recherche de conséquences théoriques, que sais-je, il ne faut jamais oublier cette question centrale, « quels sont les mécanismes ? », sans quoi nous risquons de faire des identifications de phénomènes, des caractérisations « techniques » des phénomènes, etc. mais nous risquons d'oublier de faire une activité véritablement scientifique.
Notamment  on prendra garde de ne pas s'arrêter aux lois, même si l'on est heureux de les avoir trouvées, tant il est vrai, d'expérience, que nombre de nos amis passent bien plus de  temps aux caractérisations quantitatives qu'à la recherche difficile des mécanismes.

dimanche 13 avril 2014

Pardon pour ma naïveté



Je commence aujourd'hui une nouvelle série de billets, qui ont pour vocation de diffuser de l'optimisme, car c'est un fait que la vie est merveilleuse;-). Un fait qui n'est pas discutable, juste un fait de décision. Et ces billets sont un entraînement pour des temps plus sombres, à moins qu'il n'y ait là un vice de raisonnement à admettre des temps sombres alors que, précisément, on s'efforce de les voir clairs.
Examinons donc très rapidement la question : les temps sont-ils sombres ? Si nous relisons Aristophane, nous voyons Athènes dans un état ni meilleur ni pire que celui du monde environnant. Évidemment, entre temps, il y a eu des périodes terribles, telle la Guerre de Trente Ans, qui a décimé littéralement l'Alsace, ou des guerres dites mondiales dont on était heureux de sortir vivant. Cela, on ne peut le nier, mais on peut aussi observer que les études sur le sentiment de bonheur ont quantitativement révélé que tous les peuples sont heureux de la même façon, quelle que soient les circonstances. Oui, même dans des pays où sévit la famine, l'Unesco a mesuré que la proportion de gens qui se disent heureux est comme dans des pays plus riches. Le fait que la vie soit merveilleuse doit donc être un
a priori, pas plus (mais pas moins) ;
Surtout n'est-ce pas une politesse pour notre environnement, la collectivité, que de partager avec elle notre émerveillement, face aux beautés du monde. C'est un peu la position du guide, dans le musée, qui attire notre attention sur tels détails remarquable des tableaux, telle circonstance extraordinaire de leur réalisation, telle histoire des toiles, passées de mains en mains jusqu'à nous... Notre nouveau langage sera allégorique, à la manière des cercles et des sphères de Dante, mais nous éviterons les cercles de l'enfer, pour nous concentrer sur les sphères du paradis. Je propose que le centre de ces cercles concentriques soit occupé par le mot « mécanisme ».




Mécanisme : c'est un mot d'enfant, puisqu'il renvoie à ce « Papa, maman, comment ça marche ? »
Oui, comment ça marche ? Quel est le mécanisme ? La focalisation sur cette question n'est-elle pas la clé du bonheur ? C'est la clé de l'Etude, qui évite que l'on se perde en ego, en oisiveté ; la clé de cette curiosité qui nous pousse, nous fait vivre, nous conduit à voir toujours plus loin, toujours après. C'est la clé des sciences, et aussi la clé des technologies ; c'est la clé de la compréhension du monde, la clé de la destruction des idoles... Quel est le mécanisme ?
Certains... cercles (;-) ) ont bien utilisé ce questionnement très humain pour construire des lieux d'élévation et éventuellement de pouvoir : on met une porte, et la femme de Barbe bleue veut voir ce qu'il y a derrière, et l'enfant regarde par le trou de la serrrure. On crée des secrets, et l'être humain veut les percer. On fait des « mystères », et n'est-ce pas pour nous faire croire qu'il y a « quelque chose » que nous ignorons et que nous devons découvrir ? Le secret, le mystère : bien sûr, certains malhonnêtes peuvent utiliser ce... mécanisme pour détourner notre penchant (sans doute biologiquement codé), mais on peut aussi l'utiliser à des fins plus élevées. Par exemple, Aristophane disait justement qu'enseigner, ce n'est pas emplir des cruches, mais allumer des brasiers. Ne pouvons-nous utiliser le penchant humain pour le « mystère » en vue de mettre nos « amis » sur le chemin de l'exploration, les lancer dans leur propre quête, dont le but sera peut-être même à trouver, à définir en même temps que le chemin se fera ?
Tout cela est bien grave, et ce n'est pas un petit esprit comme le mien qui peut prétendre à contribuer beaucoup à la question, mais au moins, je crois utile à l'élaboration d'optimisme  de poser la question : « quel est le mécanisme ? ».

mardi 18 juin 2013

Mardi 18 juin 2013. La connaissance par la gourmandise : Histoire de soufflé



Quels rapports peuvent exister entre la science quantitatives et les techniques et sciences ? Je ne me prends pas pour Jésus qui parlait en paraboles, car ce serait blasphéme, mais l'histoire de l'étude des soufflés répond bien à la question posée.
Partons de la cuisine et demandons nous pourquoi les soufflé gonflent ? Dans les années 1980, la théorie était que les soufflé gonflent, parce que les bulles d'air qui sont présentes (apportées lors du battage des blancs en neige) se dilatent à la chaleur, faisant augmenter le volume du soufflé. Voilà une « théorie » ; or les sciencitifique savent que toutes les théories sont fausses, disons insuffisantes.
En quoi cette théorie était-elle fausse ? Pour le savoir, il fallait mettre en oeuvre la méthode scientifique classique, qui consiste à chercher une conlusion de la théorie, une conséquences, puis à la tester expérimentalement. Pour chercher cettte conséquences, il suffit de penser à cette merveilleuse particularité de la méthode des sciences quantitatives, qui veut que tous les phénomènes soient nombrés, quantifiés, mesurés. En l'occurence, la théorie considérait l'expansion thermique, la dilatation d'un de l'air. Pour décrire ce phénomène, il existe des lois plus ou moins approchées, mais qui, quand même, donnent des résultats merveilleusement proches du résultat réel, pratique. L'une des lois élémentaires qui décrivent le résultat est ce que l'on nomme la « loi les gaz parfaits ». Elle stipule le produit de la pression par le volume est proportionnel à la température. Je vous épargne les calculs (ils sont amusants, mais leur exposé nous ralentirait dans la discussion ici proposée) : ils conduisent à prévoir une augmentation de volume de 20 à 30 pour cent seulement... alors que les soufflés peuvent gonfler de 200 pour cent... Si l'on améliore les calculs en tenant compte de la pression, c'est plutôt pire, ce qui signifie que les meilleures lois conduiraient à penser que le gonflement des soufflés est très faible par rapport à celui qui est dû à la dilatation thermique.
Il fallait donc en conclure qu la théorie était très insuffisante, très fausse.

Mais alors, pourquoi les soufflés gonflent-ils ? C'est une chose amusante, rétrospectivement, que d'observer que, à l'époque, on en avait aucune idée ! Il a fallu en des centaines de mesures de pressions ou de la température dans des soufflés pour finalement arriver à la conclusion qu'un autre phénomène que la dilatation thermique était à l'oeuvre.
Ce phénomène est apparu parce que des soufflés avaient été pesés avant et après la cuisson. Pesés ! Là encore, il s'agissait de suivre les traces des grands anciens, en l'occurence Antoine Laurent de Lavoisier, pour qui la balance était l'outil essentiel. Or quand on pèse un soufflé, avant et après cuisson, on découvre qu'il perd environ 10 grammes. Dix grammes ? Dix grammes de quoi ? Analysons : un soufflé est fait majoritairement de farine, d'eau, de protéines, de graisses. De sorte que, puisque les protéines, la graisse et la farine ne sont pas évaporables à la chaleur, c'est l'eau qui est perdue. Et, effectivement, c'est naturel, car la température dans le four, environ 200 °C, est supérieure à la température d'ébullition de l'eau.
Il faut donc conclure que c'est l'eau qui fait gonfler les soufflés, parce qu'elle s'évapore. Tout s'éclaire alors : la présence de la croûte, qui est une partie sans eau, les bulles que l'on voit monter et crever à la surface, si l'on regarde dans un four dont la porte est transparente...
Et puis, il y a le fait que 10 grammes d'eau font environ 10 litres de vapeur ! Pourquoi n'obtient-on alors pas des soufflés de dix litres ? Parce que les bulles sont perdues à la surface.
Au total, on n'aura pas de prix Nobel avec cette découverte, mais on aura la satisfaction de voir une saine application de la méthode de sciences quantitatives conduire à une bonne compréhension des phénomènes.
Mais je n'oublie pas que ce billet particulier est destiné à parler de gourmandise, c'est-à-dire de soufflés plutôt que des mécanismes de son gonflement. Et, là, le résultat scientifique a des implications immédiates. Puisque c'est l'évaporation de l'eau, et non la dilatation des bulles d'air, qui est le mécanismes essentiel de gonflement, pourquoi battre des blancs neiges ? De fait, dans un séminaire de gastronomie moléculaire, nous avons comparé un soufflé avec des blancs battus et un soufflés avec des blancs qui n'étaient pas battus mais qui était chauffé par le fond. A la stupéfaction de tous les participants du séminaire, les deux soufflés ont gonflé de la même manière ! Et c'est ainsi que la gourmandise éclairée des travaux scientifiques.