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vendredi 1 mai 2020

Questions de toxicité

Chers amis
Cette fois-ci, il faut que je vous parle de quelque chose qui sort de mon domaine. Cela ne signifie pas que je n’y connaisse rien, puisqu’il sera question de chimie, mais les matières évoquées ne font pas l’objet de mes travaux personnels. Je lis les « bons auteurs », dans des « revues sérieuses », afin de bien comprendre les faits, et d’en tenir compte dans mes études, mais mon intérêt est ailleurs.

Cette précaution prise, permettez-moi de commencer en évoquant le cas extraordinaire de la controverse entre deux cuisiniers espagnols : Santi Santamaria (décédé) et Ferran Adria.
Les faits d’abord, avant les interprétations :  Santamaria, qui se disait fils de paysan et attaché au « terroir » (qu’entendait-il par ce terme ?), avait attaqué la cuisine moléculaire par voie de presse, en accusant Ferran Adria de servir à ses clients plusieurs grammes de méthylcellulose et d’autres additifs néfastes pour la santé. L’attaque était grave : en gros, Adria et les cuisiniers moléculaires auraient été des empoisonneurs. On a fait des procès retentissants pour moins que cela.
Les interprétations, maintenant, avant que je ne fournisse les données pour savoir si, oui ou non, il y a des dangers à utiliser des additifs, comme cela est périodiquement dit par des factions variées. Mon interprétation principale est la suivante : je trouve troublant que Santamaria ait fait cette attaque au moment même où il publiait un livre. N’est-ce pas le meilleur moyen de se faire une extraordinaire publicité (et ça  a marché : la preuve, nous en sommes à en parler) et de vendre son livre ?
Effaçons vite de notre esprit la pensée de personnages que je n’estime pas en raison de leurs actes que je condamne, pour examiner la question passionnante de la toxicité, en cuisine. Oui ou non les additifs sont-ils mauvais pour la santé ? Et, inversement, y a-t-il des aliments « bons pour la santé », comme une certaine industrie ne cesse de nous le dire ?


La question des additifs
Commençons par la méthylcellulose : c’est un additif alimentaire autorisé par l’Union européenne, sous le numéro E 461. C’est une poudre blanche, qui forme un liquide visqueux et qui gélifie à chaud. D’où sort-elle ? L’industrie qui la fabrique part de cellulose, matière qui se trouve dans toutes les plantes et qui, à l’état pur, forme le coton hydrophile. C’est une matière qui n’est pas assimilables par les êtres humains, parce que ceux-ci ne sont pas des ruminants, dont les micro-organismes intestinaux fermentent le produit. On dit que c'est une "fibre".
Toutefois, la cellulose n’est pas soluble dans l’eau. Aussi, l’industrie a-t-elle appris à rendre la cellulose soluble (mais toujours non assimilable) en la modifiant moléculairement. Oui, moléculairement : est-ce grave ? Nous y reviendrons.
La méthylcellulose est sans danger, au point que l’industrie pharmaceutique la préfère aujourd’hui à la gélatine, pour faire ses enrobages. En outre, les quantités nécessaires pour faire des gels sont infimes, parce que c’est un très bon agent gélifiant. Les gels obtenus sont amusants, culinairement parlant : à l’inverse de la gélatine, ils prennent à chaud, et se défont à froid.
Et si l’Union européenne considère la méthylcellulose comme utilisable par l’industrie alimentaire, c’est que la méthylcellulose a passé un grand nombre de tests de toxicologie, et qu’elle les a passés avec succès… comme les autres additifs.
Additifs ? J’ai déjà évoqué le code E 461 de la méthylcellulose ; c’est un cas particulier d’une liste qui comprend tout aussi bien des gélifiants que des colorants, des agents antioxygène, des conservateurs… Bref, de ces produits que les « gens du terroir » (à nouveau, de quoi s’agit-il ?) détestent, parfois par méfiance, par prudence dirons-nous en étant charitable, parfois par idéologie (ces produits sont souvent utilisés par l’industrie alimentaire, laquelle, pour certains, est un démon capitaliste à abattre, avec des multinationales tentaculaires), parfois par conviction, parfois…
Sans prendre parti, pour l’instant, explorons la liste. Elle est très hétérogène, puisqu’elle comprend par exemple le caramel (E 150), ou le rocou (E 160b), colorant alimentaire largement utilisé en Amérique du sud, le lycopène (E 160d), qui est le colorant des tomates, le dioxyde de titane (E 171), colorant blanc utilisé par les pâtissiers… De même, dans la catégorie des conservateurs et agents antioxygène, on trouve l’acide benzoïque (E 210) à côté du métabisulfite de sodium (E 223), de l’acide lactique (E 270), de l’acide ascorbique (E 300), qui n’est autre que la vitamine C… Les agents de texture ? L’amidon fluide (E 1400) est dans cette catégorie, à côté du tartrate de calcium (E 354, les cristaux au fond des bouteilles de vin), de l’agar-agar (E 406), de la gomme adragante (E 413), qui était préconisée dans les livres de cuisine du 19e siècle comme fixateur de la crème chantilly…
Au total, ce qu’il faut remarquer, c’est que les composés sont très divers. Certains sont d’usage classique et courant, en restauration ou en cuisine domestique. D’autres sont inhabituels et pourraient le devenir. D’autres encore n’ont pas de raison de figurer.


Ne jamais chercher à convaincre

Au total, ces produits sont-ils dangereux ? Ne comptez pas sur moi pour le dire, ni pour dire l’inverse, car je ferais alors quelque chose d’inutile. L’expérience m’a montré qu’il est complètement inutile, inefficace, idiot même, de vouloir convaincre ceux qui ne veulent pas l’être. Par exemple, cela fait des années que, questionné à propos d’OGM, je réponds la chose suivante : soit mon interlocuteur et moi-même les jugeons sans danger, ou les jugeons dangereux, et cela ne sert à rien d’en parler ; soit l’un de nous les trouve dangereux et l’autre les trouve admissibles, et une réponse de ma part ne convainc pas, mais me fait perdre un ami. Alors, à quoi bon ?
Pour la question des additifs, il en va de même. Si j’en prenais le parti, je perdrais des amis sans convaincre personne. D’ailleurs, pourquoi en prendrais-je le parti ? Parmi ces produits, certains sont intéressants et d’autres sont inutiles ! Par exemple, il est connu que le métabisulfite de sodium, pourtant utilisé par nombre de vignerons, n’est pas aussi anodin que l’agar-agar. Je n’ai aucune raison de préconiser son usage en cuisine… mais les vignerons me diront souvent que les vins blancs sont fragiles, microbiologiquement, et que l’emploi du produit s’impose. D’ailleurs, il est amusant de voir certains partisans de la biodynamie refuser à tout prix ce produit… et mécher les tonneaux avec du soufre ! Le soufre qui brûle engendre le dioxyde de soufre, qui a la même toxicité que le métabisulfite de sodium, mais il est bien plus difficile à doser.
Donc je ne prendrais pas inutilement le parti de tous les additifs, car cela me vaudrait une fois de plus d’être considéré comme un suppôt de l’industrie chimique, ce que je ne suis pas. Je ne cherche pas à convaincre : je cherche seulement à distribuer des connaissances pour que chacun se détermine personnellement, pour que chacun fasse des choix éclairés.


La nature n’est pas une garantie


Par exemple, je trouve insensé que certains cuisiniers utilisent des huiles essentielles avec si peu de discernement. Par exemple, autant l’estragon est utilisable en cuisine, autant l’usage d’une huile essentielle d’estragon serait critiquable, parce que l’estragole que contient l’estragon, tératogène (il engendre des malformations des fœtus) et cancérogène, concentré dans l’huile essentielle, est alors dangereux. De même pour des huiles essentielles de noix muscade, de laurier, mais aussi de bien d’autres plantes.
La concentration est-elle la caractéristique qu’il faut redouter ? Non : j’ai récemment rencontré un cuisinier qui faisait des infusions de grappes de tomate. Oui, l’odeur est plaisante, fraîche, mais je préfère ne jamais manger dans le restaurant de ce professionnel. Ce serait la même chose pour quelqu’un qui abuserait des peaux de pomme de terre, des haricots verts crus, des haricots blancs crus…
L’origine « naturelle » des produits n’est pas une sécurité : pensons à la cigüe, à l’amanite phalloïde. Renseignons-nous bien avant de faire manger des produits nouveaux, dont nous ignorons la toxicité.
Et je répète que les additifs ont été testés et retestés : l'Académie d'agriculture de France a organisé une séance publique, l'an passé, pour discuter cette question, présenter publiquement les méthodes et les résultats.


La tradition n’est pas une garantie


Si l'on craignait ou si l'on craint les additifs, faut-il alors se réfugier dans la tradition ? Hélas, ce refuge n’est pas sûr ! N’oublions pas que nos ancêtres ne savaient rien des effets à un peu long terme des produits. Ils voyaient bien si quelqu’un était aussitôt malade en consommant des produits, mais ils n’avaient aucun moyen épidémiologique pour estimer l’influence à long terme des consommations alimentaires.
Par exemple, il a fallu de nombreuses études pour montrer que le fumé est dangereux… au point que les populations nordiques, qui mangent plus d’aliments fumés que les autres Européens, ont plus de cancers digestifs. Là, il n’y a pas de doute : les benzopyrènes qui viennent se déposer sur les viandes ou poissons fumés sont cancérogènes de façon certaine ! Le danger est, pardonnez-moi d’y revenir, considérablement plus grand que celui de la méthylcellulose. Il est avéré, certain, mesuré, étudié…et nous continuons de consommer des viandes grillées au barbecue. Et le risque est réel.  Au fond, nous sommes bien hypocrites : quand cela nous arrange, nous refusons la consommation de produits, mais nous n’hésitons pas à manger du sucre, du saumon fumé, des grillades au feu de bois…


Que manger ? Que cuisiner ? Je crois que la profession a besoin d’informations qu’elle n’a pas suffisamment. C’est un des objectifs de la Fondation Science & Culture Alimentaire que de mettre en ligne, pour le monde culinaire, des informations fiables, sur ces questions. Il ne s’agit pas de convaincre, mais d’informer.

mardi 21 janvier 2020

Les gens honnêtes n'ont rien à cacher.


Je retrouve un billet ancien, jamais publié :


Hier un journaliste aimable et amical me téléphone pour m'inviter à un « débat » qui serait consacré aux cas de désagréments alimentaires qui sont récemment survenus après des repas chez Heston Blumenthal, à Londres. Les services vétérinaires ont fait état d'intoxication par des huîtres, et non pas par des "additifs".
 
En effet, depuis quelques jours, quelques journalistes idéologiquement opposés à la cuisine moléculaire (pas le journaliste aimable dont je parlais ci dessus) ont publié des articles pour dire, comme une litanie, que la cuisine moléculaire est dangereuse pour la santé.
En réalité, ces journalistes idéologiques (et peu scrupuleux, donc) sont peu nombreux : un, deux, trois peut-être... Guère plus, mais c'est assez pour que l'on puisse s'interroger, d'autant que, rappelez-vous : une litanie. 
 
Quant aux additifs qui nous empoisonneraient, nos litanistes (une façon pour moi de parler par euphémisme, et d'éviter des procès qu'ils ne manqueraient pas de me faire si je disais la totalité de ma pensée) omettent de dire que le caramel en est un, comme le glucose (qui est dans tous les fruits et légumes, comme...
Bref, "les additifs", c'est une catégorie trop vaste pour qu'on puisse tous les fourrer dans le même sac, même s'ils relèvent tous d'une même réglementation, et s'ils ont tous été testés d'un point de vue toxicologique de la même façon. 

Passons, car là n'est pas la question. 

Il est sans doute inutile de discuter une fois de plus (cela fait des décennies que cette discussion a lieu) la question des additifs et d'une sorte de prétendu complot de l'industrie alimentaire. Si les additifs sont autorisés, c'est qu'ils ont fait l'objet de NOMBREUSES études de toxicologie.
Donc oublions la questions des additifs. 
La question de la cuisine moléculaire, et de désagréments ou d'intoxications alimentaires dans des restaurants de cuisine moléculaire ? Dans un billet précédent, j'ai expliqué qu'une hirondelle ne fait pas le printemps, que quelques cas dans un restaurant ne peuvent être érigés en lois, mais seulement en cas. J'ai dit aussi que le nombre d'intoxications alimentaires consécutives à des repas dans des restaurants traditionnels est bien supérieur au nombre de cas dans les restaurants qui servent de la cuisine moléculaire. En réalité, la quasi totalité des toxi-infections alimentaires résulte du non lavage des mains par les cuisiniers ! 

mais, je discute plutôt ici, du moins aujourd'hui, la question de cette invitation à débattre d'un problème survenu dans un restaurant. Les journalistes qui préparaient l'émission m'ont proposé de venir « débattre » contre un de ces litanistes. Débattre contre des malhonnêtes ? Je ne parle pas aux roquets qui aboient. Et puis, après tout, quand on y pense, est-ce bien utile ? La vraie question est d'abord d'établir les faits. Or les faits sont : quelques cas, dans un ou deux restaurants (et je répète qu'on ne parle pas des cas dans les restaurants de cuisine traditionnelle), plus des SOMMES d'articles qui étudient l'innocuité des additifs (d'accord, ma formulation est tendancieuse, tout comme l'aurait été celle qui aurait été « qui étudient la toxicité des additifs »). 
 
Pour les faits, rien à débattre : il y a les faits.

Pour les articles, il faut quand même apprendre à les lire, et je maintiens que peu de personnes "savent" lire des articles scientifiques... parce qu'ils se limitent aux résultats. 
Un bon scientifique, au contraire, est quelqu'un qui a appris à se préoccuper des « Matériels et méthodes », cette partie essentielle pour bien comprendre les résultats, et, a fortiori, les interprétations des résultats. Un bon scientifique, c'est quelqu'un qui sait manier les incertitudes (le calcul différentiel s'impose ; je rappelle que quelqu'un qui sait, c'est quelqu'un qui a appris). Un bon scientifique, c'est quelqu'un qui sait qu'une expérience doit être répétée, qui sait ne pas confondre modèle et réalité, qui sait que la science réfute et ne démontre pas, qui sait... 
Tout cela s'apprend, et l'on ne s'improvise pas scientifique. On n'est donc que très exceptionnellement capable de lire une publication scientifique, quand on n'est pas scientifique. Pis : ayant travaillé à la revue Pour la Science pendant 20 ans, je sais combien l'examen des articles « de l'extérieur » est un exercice périlleux. Tout tient dans les calculs qui sont faits, dans la fiabilité de l'expérimentation, et c'est notamment pour cette raison que le travail de rapporteur est si long... Je ne dis pas que les journalistes sont incapables, mais je constate que ce n'est pas leur métier, et donc leur compétence, que de lire des publications scientifiques, surtout quand ils sont chroniqueurs culinaires !

Donc débattre avec des incompétents ? Il ne peut y avoir que de la pédagogie, pas du débat !
Et, pis encore, il ne peut rien en sortir, car nos litanistes, en réalité, ne veulent pas entendre : ils veulent simplement vendre du papier, du scandale. L'information est le cadet de leur souci. Je me souviens, ainsi, d'un de ces litanistes qui, sur une grande radio, enchaînait contre vérité sur contre vérité, complètement imperméable aux réfutations qu'on lui faisait. Quel manque de dignité : personnellement, j'ai honte quand on me reprend, si j'ai fait une erreur... et je m'empresse de rectifier !
Mais il faut relire Platon, qui montre bien que la rhétorique se pare impunément des plumes du paon tout en délivrant des messages fallacieux. En face, il est inutile d'essayer de proposer des faits, fondés sur des études, scientifiques ou technologiques. On ne dit pas assez que de telles études représentent des mois d'efforts pour obtenir des résultats... qui, finalement, ne pèsent rien dans un débat, ou, du moins, pas plus lourd que la parole bien dite.
Bref, débattre contre des journalistes d'une presse poubelle ? Je ne fais pas les poubelles !

Allons, soyons positifs, parce que c'est la moindre des politesses.

D'une part, je suis heureux de signaler que, finalement, les journalistes aimables qui m'invitaient à débattre ont changé d'idée, preuve que ceux-là sont fréquentables. D'autre part, agent de l'Etat, je sais qu'il y a un devoir d'information du public, afin de répondre à des inquiétudes, injustifiées, certes, mais qui existent (à cause de nos litanistes : les « marchands de peur » sont des dangers publics, à ne pas confondre avec de véritables lanceurs d'alerte). Je vais donc dire des faits, en indiquant au préalable que je n'ai rien à vendre : ni article, ni produit, ni idéologie, même. Certes, je pense que la Raison doit être promue, au même titre que la Connaissance, qui nous fait humain. Certes, je propose de voir le verre bien plus qu'à moitié plein... mais il y a quand même les faits : jamais les êtres humains n'ont vécu aussi longtemps en bonne santé. Cela est le fruit de l'hygiène, des additifs (les conservateurs qui évitent le botulisme!), des cosmétiques, des médicaments, de la technologie.
Je n'échange pas ma vie aujourd'hui contre celle d'il y a 100 ans. D'ailleurs, à l'âge que j'ai, je serais sans doute déjà mort depuis longtemps (n'oublions pas qu'il n'y avait pas d'antibiotiques, par exemple).

vendredi 28 juin 2019

A propos de dioxyde de titane

Et voici qui vient de l'Efsa :


On 15 April 2019, the French Agency for Food, Environmental and Occupational Health and Safety (ANSES) published an opinion on the risks related to the exposure to the food additive titanium dioxide (E 171) taking into account the most recent scientific studies available.

Further to this publication, EFSA was requested by the European Commission to provide urgent scientific and technical assistance regarding the opinion issued by ANSES. In the ANSES opinion, 25 new relevant publications published between 2017 and 2019 were reviewed together with previous opinions by EFSA and ANSES and a systematic review on in vitro genotoxicity of nano titanium dioxide. In this statement, EFSA concludes that the ANSES opinion published in April 2019 does not identify any major new findings that would overrule
the conclusions made in the previous two scientific opinions on the safety of titanium dioxide (E 171) as a food additive issued by the EFSA ANS Panel in 2016 and 2018.
The ANSES opinion reiterates the previously identified uncertainties and data gaps, which are currently being addressed in the context of the follow up activities originating from the previous EFSA evaluations and their recommendations. In addition to the aspects for which the follow up
work is currently ongoing, ANSES recommends further investigation of in vivo genotoxicity.

EFSA considers this recommendation should be revisited once the ongoing work on the physico-chemical characterisation of the food additive titanium dioxide (E 171) is completed.

dimanche 20 décembre 2015

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !

Le même que celui du 19 décembre, mais en plus charitable

On m'envoie un article où je lis :

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci ! J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". 

Bien sûr, c'est la solution ! Chaque fois qu'on ne connais pas quelque chose, cela nous "pose problème". Et quand "cela nous pose problème", on élimine l'usage !
Tiens "pose problème" ? Je croyais qu'en français, on mettait des articles devant les noms ? Soit la mode a changé, soit notre interlocuteur a un usage limité du français. Pardon, je devrais peut-être écrire : soit mode a changé, soit interlocuteur a usage limité français.

Cela dit, la solution qui consiste à supprimer de notre existence tout ce que nous ne comprenons pas est merveilleuse, séduisante non ? Regardons-y de plus prêt.

Nous ne comprenons pas le fonctionnement de l'ordinateur que nous n'utilisons ? Revenons sans tarder à la Gentille Plume d'oie et à la Gentille Encre artisanale ou domestique.
Mais, au fait, d'où vient cette plume ? Il nous faudra aller à la Gentille Ferme voisine (ou faire notre élevage nous-même) pour en trouver sur une l'oie, un canard, sans quoi, on ne sait jamais : le Grand Complot pourrait nous refiler des "fausses plumes" !
Et l'encre ? N'utilisons certainement pas de la Vilaine Encre du "commerce", parce qu'on ne sais jamais : "ils" ont sans doute trafiqué notre produit. Oui, faisons  bouillir des clous rouillés avec de l'écorce d'arbre, puis filtrons, et stabilisons le produit avec de la gomme, exsudation d'arbre.
Bon, d'accord, écrire devient plus compliqué, mais combien "plus en accord avec nous-même" ! Et puis, nous sommes rassurés de tout "bien connaître".

Au fait, bien connaître : comment les oies, les canards, ont-ils ces plumes ? Je l'ignore : cela "pose problème". Pourquoi l'eau où l'on cuit écorce et rouille devient-elle noire ? Aïe : cela "pose problème". Et pourquoi certains arbres font-ils cette gomme ? Cela "pose problème". Et pourquoi la gomme stabilise-t-elle l'encre ?
 J'ai une idée : puisque je ne le sais pas, je ne vais pas utiliser la gomme, et secouer l'encre avant chaque utilisation. Après tout, tant qu'à nous compliquer la vie, ne reculons pas devant de petits sacrifices...

Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause.

Je veux  consommer des ingrédients que je connais ?
Revenons à la question de l'alimentation, puisque c'est cela dont il s'agit. Pour 80 pour cent des Français, qui vivent en ville, les légumes viennent des maraîchers. Selon la Théorie du Grand Complot, ce sont certainement de gros industriels malhonnêtes, qui font leur beurre sur notre dos. Allons chercher les légumes  à la ferme. Pas le temps ? Alors créons des associations, avec nos cotisation qui payeront du  personnel pour nous procurer des fruits et légumes dont nous connaissons l'origine. Non, la solution est mauvaise : si nous payons du personnel, le personnel sera exploité. Alors il y a le système des AMAP, pour lequel des Gentils Producteurs nous donneront nos produits. Mais, au fait, quelle différence avec un marché ? Sur le marché, ne s'agit-il pas de Gentils Producteurs qui viennent vendre leurs  produits ? Ah non ! Il y a les "Affreux Intermédiaires", ceux qui font du beurre sur notre dos et sur celui des Gentils Producteurs.

Bon, nous avons donc supprimé les Affreux Intermédiaires, et nous savons qui produit ce que nous mangeons. Mais, au fait, comment cela est-il produit ? Allons,  chacun sait qu'on met une graine dans la terre et que ça pousse tout seul. Arroser ? Ce n'est pas de la chimie. Des engrais ? Le fumier. Mais les semences ?
Là, deux  possibilités : selon la théorie proposée initialement, de la même façon que l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures  et les semences ? Il y a la solution de virer semences et méthodes de culture. Ou bien de rester aux graines que le légume fait lui-même, et ne pas utiliser des Vilaines Semences du Commerce : le Grand Complot veut certainement faire du blé sur notre dos !
Donc nous n'irons nous fournir que chez les Gentils Maraîchers qui n'achèteront pas les semences de Méchants Semenciers industriels. Oui, "industriels" : le mot arrive. Ce qui est Très Mauvais, c'est l'industrie ! Nous ne traiterons qu'avec des Gentils Artisans.
La voilà, la solution qui nous était proposée !
Pour les viandes ? Avec notre système précédent, nous ne prendrons de la viande que si elle vient d'un Gentil Eleveur "artisanal". Tiens, au fait, combien de bêtes un tel homme peut-il élever au maximum ? Seul ? Nous avons dit un artisan, soit quelqu'un qui n'exploite pas autrui. Limitons donc l'exploitation à un homme et sa famille. Personne en plus, sans quoi nous verserions dans la Méchante Industrie. Oui, parce que, si nous employons quelqu'un, c'est le début de la fin : un employé, deux, trois, dix, cent... D'ailleurs, au Canada, ne disent-ils pas que les chefs sont l'industrie ? Ce qui est juste : je connais des cuisiniers qui ont plusieurs restaurants et qui, de ce fait, employent beaucoup de monde ! L'Abominable Industrie. De sorte que nous arrivons à une conclusion supplémentaire, en chemin : nous n'irons plus que chez les Cuisiniers Artisans, ceux qui font tout eux-mêmes : la cuisine, le service et la vaisselle. Les autres ? D'Affreux Cuisiniers Industriels !

Un doute m'étreint : d'accord, le Gentil Eleveur aura élevé seul ses bêtes, mais qui les abattra ? Ouf, je viens de comprendre que ce sera un Gentil Boucher Artisan, comme dans le Bon Ancien Temps. Qui aura acheté des couteaux à un Gentil Artisan coutelier, lequel aura fait les couteaux un à un, des ses Propres Mains. Le métal ? Il l'aura acheté à un Gentil Métallurgiste, artisan qui aura acheté le charbon de bois à un Gentil Charbonnier, et le minerai à un Gentil Mineur. Le Gentil Mineur ne peut pas extraire seul le minerai ? Il aura fait une association, une Gentille Coopérative !

Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Un "artisan respectueux  des matières premières" ? Ah, oui : il y a les Gentils Artisans, mais ceux-ci ne sont pas tous gentils ! Il faut qu'ils soient "respectueux des matières premières" et qu'ils utilisent produits et vocaculaires compréhensibles.
Respectueux des matières premières, quand même c'est compliqué, non ? Je dois pas avoir le Bon Etat d'Esprit, parce que j'ai vraiment du mal à comprendre ce que signifie respecter des matières premières.
Allons, un effort : pensons à de la cuisine. Et, plus précisément, pensons à la recette de poulet rôti avec des pommes de terre qui sera sur la table à midi. J'ai donc un poulet qui vient d'un Gentil Eleveur, puis d'un Gentil Boucher. Comment le cuire en le respectant ? Je vois bien que je peux le manipuler avec une grande douceur... mais il est mort. Alors le cuire sans le chauffer trop ? La peau ne sera pas croustillante ! Une idée : chercher dans le dictionnaire ce que "respecter" signifie. Le Gentil Trésor de la langue française informatisé nous dit "action de prendre en considération". Bon, si je prends la cuisson en considération, je respecte. Autrement dit, il faut que je réfléchisse... D'ailleurs, l'article que l'on m'avait signalé disait bien "réfléchir en connaissance de cause".
Mais, au fait, pourquoi ne pas "prendre en considération" les additifs ? Ah, non, quand même  pas les additifs, puisque c'est une Méchante Invention.
Alors que farine, sucre, beurre, légumes, sel... Au fait, sais-je bien ce dont il s'agit ? Farine ? Je l'aurai achetée à un Gentil Meunier, un artisan, lequel se sera fourni à un Gentil Agriculteur, qui aura travaillé seul. Comment ? Là, les calculs les plus simples montrent que, sans mécanisation, un homme ne peut faire vivre que quatre personnes, à condition de ne faire que travailler. Pas de vacances pour notre Gentil Agriculteur ? Bon, d'accord, laissons-le Laissons avoir un tracteur. Un tracteur qui viendra d'où  ? D'un Gentil Artisan fabriquant de tracteurs ?

Vite, vite, passons au  sucre, puisque je ne sais pas répondre à la question : après tout, n'avions-nous pas comme conseil de supprimer de notre vie tout ce qui nous "pose problème" ?
Donc le sucre : ne l'achetons qu'à un Gentil Artisan, qui aura  lui-même lavé les betteraves d'un Gentil Agriculteur, qui aura lui-même broyé ses betteraves, aura ajouté de l'eau, de la chaux... De la chaux ? Oui, il se sera procuré la chaux d'un Gentil Artisan. Comment ce dernier aura-t-il  chauffé son four à chaux ? Pas d'électricité, parce que, là, on risque gros. Pas de nucléaire, bien sûr. Pas de centrale à charbon. Pas de pétrole. De l'éolien et du  solaire ? Pas des panneaux solaires, puisqu'ils sont fabriqués par de Méchants Industriels, et pas de ces grosses éoliennes industrielles modernes. Des moulins, de Gentils Moulins !
Passons au beurre. Facile : cela vient d'un Gentil Eleveur, ou d'un Gentil Crémier. Le sel ? Un Gentil Saunier. Il sera venu au marché, avec son sel, et nous saurons d'où vient le sel. Au fait, il aura fait six cent kilomètres pour venir du bord de mer ? Ben... oui. Et qui extraira le sel, pendant ce temps ? Allons, on sait bien que le vent et le soleil évaporent l'eau sans intervention humaine.

Et c'est ainsi que nous avons des  légumes, des viandes, de la farine, de l'huile, du sucre, du sel. Avons-nous vraiment besoin  d'additifs ?
Faisons l'essai d'une crème au caramel, pour le savoir. Il suffit d'avoir des oeufs, du sucre, du lait, de la vanille. Tout va bien... jusqu'au caramel : c'est un additif de code E150 ! Oui, mais c'est un Méchant Additif si nous l'achetons, mais si nous le faisons nous-même, cela devient un Gentil Caramel. A la limite, d'ailleurs, pourquoi ne pas l'acheter à un Gentil Artisan fabriquant de Gentil Caramel.
Une autre recette : une tarte au  citron meringuée. De la farine, du sucre, de l'eau, du citron, des oeufs, du sel. Le citron ? Il  sera acheté à un Gentil Maraîcher. Le citron n'est pas local ? Il sera donc venu du sud de la France. Le sud de la France ne produit pas assez de citron pour tous les Parisiens ? Tant pis : ceux-ci se passeront de tarte au citron, et ils mangeront des tartes au poires ou aux pommes.
Après tout, si nous mangeons des produits locaux, nous devons aussi manger des produits de saison. Ainsi, plus de Méchants Conservateurs, lesquels font partie de la catégorie des Méchants Additifs !
En hiver, il nous reste donc Gentils carottes, choux, pommes de terre, poireaux... Qu'avons-nous besoin du reste ? Et puis, en nous limitant ainsi, nous faisons disparaître les Méchants Supermarchés.

La proposition initiale était donc Merveilleuse : de la soupe aux choux tous les jours, des tartes aux pommes, et nous ne cherchons pas à savoir d'où viennent les plumes des canards, l'énergie...
Ne nous posons pas de question, et soyons Respectueux. Quelle Vie Merveilleuse s'offre à nous !

samedi 19 décembre 2015

Intérêts cachés

On accuse moins de "conflit d'intérêt" les charlatans qui font leur beurre sur le buzz que les scientifiques.

Passons sur le fait que l'expression "conflit d'intérêt" soit idiote (les intérêts n'ont pas de conflit, et il faut parler plus justement d'intérêts cachés), et focalisons-nous sur le fond de la chose.
Par exemple, ne doit-on pas s'étonner qu'un individu puisse impunément faire un article "à scandale"... quand il est l'auteur d'un livre sur le sujet ? Le scandale fait vendre son livre ! Bien sûr, on peut toujours, charitablement, considérer que notre auteur est si ému par son sujet qu'il  multiplie les façons de promouvoir son point de vue... mais pourquoi, alors, ne donne-t-il pas ses droits d'auteur à une oeuvre ?
 Aujourd'hui, on me signale un homme qui "vend du bon naturel"... en mentionnant évidemment de se reporter au livre qu'il a écrit. Dans son article, on lit : 

La liste des additifs autorisés, nomenclaturés avec la lettre E suivis de quelques chiffres, vous pose problème, car vous ne les connaissez pas ? Aucun souci !
J’ai depuis bien longtemps banni de mon alimentation tout aliment contenant le moindre additif "E". Je veux consommer des ingrédients que je connais et réfléchir en toute connaissance de cause. Un artisan respectueux des matières premières utilisera des produits et un vocabulaire que vous comprenez tels que farine, sucre, beurre, légumes, sel… et non E 330, E 420 ou E 621.

Une telle déclaration est idiote, parce que les "artisans", comme il dit, utilisent les mêmes additifs que les industriels qu'il stigmatise, et auxquels s'applique une réglementation bien plus contraignante. La gélatine est un additif, tout comme le caramel, par exemple.
Et puis, un "artisan respectueux des matières premières" ? Je préfère un artisan respectueux des êtres humains  !
Ce n'est pas tout : le sel, d'où sort-il ? Le sucre ? Notre homme sait-il bien comment il est produit ? Et le beurre, et la farine...
Il propose de ne consommer que ce que nous "connaissons", mais de quoi s'agit-il ? Que sait-il des semences ? Des amendements ? Des traitements ? Si l'on refuse d'aller comprendre ce qu'est un additif, pourquoi faire l'effort de comprendre ce que sont les méthodes de cultures ?

Allons, je me suis fait  une règle de toujours être positif... et la bêtise et la malhonnêteté me conduisent hélas à les dénoncer, ce qui n'est pas une bonne façon d'avancer.
Je vais donc proposer, ici,  au contraire, de mieux connaître les additifs, les compositions et extraits odorants nommés arômes, les auxilliaires technologiques, au même titre que les fruits, les légumes, les viandes ou les poissons.

Connaître les viandes ? Puisqu'aucun de  nous (je fais l'hypothèse que nous sommes en ville)  ne prend sa viande à la ferme, nous ignorons le plus souvent les conditions exactes d'élevage (différentes de ferme à ferme), d'abattage, de transformation... Et nous voulons souvent l'ignorer, parce que nous sommes bien heureux  de ne pas avoir devant les yeux  l'animal que l'on abat. Manger de la viande, d'accord, mais à condition qu'elle nous arrive toute  prête à manger.

Les légumes ? Il suffit de voir les jardiniers du dimanche pour comprendre qu'ils ignorent que tout part de semences très encadrées par la loi... pour le bien des citoyens, et, notamment, des agriculteurs ou des maraîchers.
Ainsi le Centre technique de la production de semences (CTPS) oeuvre, pied à pied, pour que les semences soient de bonne qualité, car les biologistes  végétaux savent bien que les croisements qui favorisent certaines caractéristiques ne sont pas "stables", par exemple. Et le CTPS, également, se préoccupe de végétaux qui consomment moins d'intrants (eau, engrais, traitements). Puis, pour les méthodes de culture, l'INRA et quelques autres institutions oeuvrent  depuis longtemps pour  aider les agriculteurs à produire plus facilement des végétaux de meilleure qualité. De sorte que les critiques sont souvent idéologiques... mais pas toujours dites ainsi !  (Tiens, j'y pense : notre auteur a-t-il refusé d'utiliser un ordinateur pour faire son article et son livre ? A-t-il poussé l'obscurantisme jusqu'à écrire à la plume trempée dans l'encre ?).

Les additifs ? Ces produits ont toujours été utilisés, et le fait que nous les connaissions est une très bonne chose, parce que cela signifie que leur emploi est réglementé. Dans les années 1910, les cuisiniers et les particuliers utilisaient, par exemple, des mèches de soufre qu'ils brûlaient dans des bouteilles pour conserver les fruits : on n'ose imaginer la quantité de dioxyde de soufre qui était alors produite ! De sorte que c'est un vrai progrès que d'avoir rénové les pratiques anciennes (des artisans, ces fameux "artisans respectueux etc.) et de les avoir réglementées.
Ce qui reste à faire, c'est d'appliquer les lois imposées à l'industrie aux artisans !
Les arômes ? Même question : utilisés depuis toujours, mieux réglementés aujourd'hui, donc plus sûrs que  les pratiques artisanales.

Plus généralement, la question merveilleuse qui se pose aux instances de régulation (je pense notamment à cette merveilleuse DGCCRF du Ministère de l'agriculture) est de réguler, sans tomber dans l'hygiénisme. Pour y parvenir, il faut beaucoup de connaissances, et beaucoup de doigté, afin de protéger sans excès. Il faut aussi  beaucoup d'explications à ce public (dont je suis) que l'on ne doit pas priver d'informations justes, au contraire ! Au lieu de ne pas utiliser d'additifs (ce qui n'est pas possible : souvenons-nous du caramel), il vaut mieux apprendre à les utiliser !

samedi 18 juillet 2015

Abattons les catégories actuellement nommées "additifs" et "arômes"... mais conservons évidemment les produits aujourd'hui désignés par ces noms !

Aujourd'hui, une partie du public, représentée par quelques journalistes dont on
devrait questionner les motifs, craint les "additifs" et les "arômes". Pour eux,
les additifs sont dangereux, et les arômes sont trompeurs. Je propose ici de
bien reconsidérer cette question.

Commençons par les additifs, qui sont une catégorie très large, pour laquelle il
y a lieu de ne pas tout mélanger. Le caramel, par exemple, est un additif...
mais y a-t-il lieu de s'offusquer de son emploi ? Bien sûr que non !
D'ailleurs, il faut se demander pourquoi on oblige l'industrie à signaler la présence de caramel par un nom de code, alors que les artisans, eux, n'ont pas cette obligation. Bien sûr, le métabisulfite de sodium, utilisé pour "sulfiter" les vins, doit être signalé à la fois par l'industrie et par les vignerons, qui sont assimilables aux artisans cuisiniers, par exemple. Mais le nitrite de sodium, lui, qui se trouve dans tous les saucissons ? Pourquoi ferait-il peur dans les produits industrielset pas dans les salaisons traditionnelles ? Je revendique plus de cohérence, et, surtout, j'admet difficilement que l'on fasse procès aux "industriels" alors que les artisans ont les mêmes procédés.
Que l'on me comprenne bien : je ne suis pas en train de défendre l'industrie ;
je veux seulement de la loyauté, de la cohérence... et de l'intelligence.
Par exemple, il serait incongru de signaler tous les ingrédients sur une carte de
restaurant : où serait la poésie ? Imagine-t-on, de même, que les tableaux de
Rembrandt aient l'obligation de signaler "Bleu de cobalt, dioxyde de titane,
huile de lin... " sur de petites étiquettes, à côté du nom du tableau, dans les
musées ? Ou bien que les enregistrements d'oeuvres de Mozart portent
obligatoirement l'indication "Contient des fa dièse et des si bémol" ?

Bref, je ne suis pas sûr des raisons pour lesquelles une petite de nos
concitoyens ont peur : ignorance ? idéologie ? prudence ?
Pour la prudence, elle est louable, mais alors il suffit de s'informer, et l'on
découvre alors que les autorités de santé font preuve d'un hygiénisme peut-être
parfois excessif au regard des comportements incohérents que nous avons (tabac, alcool, manque d'exercice...).
Ignorance ? Certains journalistes y gagneraient à expliquer, plutôt que
critiquer, attaquer... mais il est vrai qu'ils vendraient moins de papier. Et
puis, je me souviens aussi d'une journaliste qui faisait des sujets de
télévision sur des mots qu'elle ne comprenait même pas : ne pourrait-on introduire un "permis d'écrire" ;-) ?
Idéologie ? Là, il y a la question du "grand capital", mais on oublie qu'un chef
qui a dix restaurants peut employer des centaines de personnes, soit plus qu'un
petit industriel. Où commence l'industrie ? Où finit l'artisanat ? Et est-ce mal
de donner de l'emploi, de faire vivre des familles ?

Mais il me faut revenir aux catégories initialement discutées, des "additifs" et
des "arômes". Je propose que nous supprimions ces catégories.

Les additifs : supprimons-le mot, parce que ces composés sont simplement des
ingrédients, au même titre que le sel, le sucre, le jus de citron
(essentiellement de l'acide citrique et l'eau), le caramel, le glucose, les
colorants alimentaires (en tout point analogues à ce "vert d'épinard" que les
cuisiniers préparent depuis des siècles), etc.
Les arômes : j'ai déjà signalé que le mot est un peu déloyal, parce qu'il a
gauchi l'acception ordinaire, qui est "odeur d'un aromate". Nous devons nommer
ces produits "compositions", ou bien "extrait".

Et, tant que j'y suis, je ne répéterai jamais assez que je crois que nous devrions proscrire l'emploi du mot "naturel", pour ce qui concerne les aliments, lesquels sont des "produits", élaborés par un être humain, donc parfaitement "artificiels", au sens juste du
mot.

jeudi 16 juillet 2015

Laissons les roquets aboyer

Ce que j'avais prévu est arrivé : un article critique, ce matin (pardonnez moi de ne pas vous donner les références, mais je ne voudrais pas faire de la publicité pour des roquets).

Cela dit, on m'envoie la citation suivante, de Theodore Roosevelt :

It is not the critic who counts; not the man who points out how the strong man stumbles, or where the doer of deeds could have done them better. The credit belongs to the man who is actually in the arena, whose face is marred by dust and sweat and blood; who strives valiantly; who errs, who comes short again and again, because there is no effort without error and shortcoming; but who does actually strive to do the deeds; who knows great enthusiasms, the great devotions; who spends himself in a worthy cause; who at the best knows in the end the triumph of high achievement, and who at the worst, if he fails, at least fails while daring greatly, so that his place shall never be with those cold and timid souls who neither know victory nor defeat.

Vive la Connaissance honnêtement produite et partagée ! 

vendredi 21 février 2014

A propos de diarrhées

Voici un lien : http://www.franceinfo.fr/consommation/a-toutes-saveurs/la-cuisine-moleculaire-rend-elle-malade-1325615-2014-02-21

dimanche 16 février 2014

Les gens honnêtes n'ont rien à cacher.

Avant-hier, un journaliste aimable et amical me téléphone pour m'inviter à un « débat » qui serait consacré aux cas de désagréments alimentaires qui sont récemment survenus après des repas chez Heston Blumenthal, à Londres.
Il semble en effet qu'il y ait une « actualité » : c'est un fait que quelques clients de H. Blumenthal ont eu des diarrhées (on peut faire plus peur en disant un mot plus savant comme "gastro-entérite") après avoir mangé non pas au Fat Duck (Bray), mais à Londres, dans un restaurant dirigé par le chef anglais.
Et c'est un fait, aussi, mais d'un ordre bien différent, que, depuis quelques jours, quelques journalistes idéologiquement opposés à la cuisine moléculaire ont publié des articles pour dire, comme une litanie, que la cuisine moléculaire serait dangereuse pour la santé (le conditionnel est de moi : eux sont plus catégoriques). C'est un autre fait que, en réalité, ces journalistes sont peu nombreux : un, deux, trois peut-être... Guère plus, mais c'est assez pour que l'on puisse s'interroger, d'autant que, rappelez-vous : une litanie.

Commençons par observer que les faits qui peuvent faire l'objet d'un traitement par les journalistes (ceux auxquels ont peut parler) sont innombrables. Décider d'en traiter un relève d'une éthique qui doit être claire. Ici, pourquoi voudrait-on informer le public ? Quelques cas de diarrhée en Angleterre méritent-ils un traitement journalistique ? Non. Parce que le public risque de croire nos « litanistes »  (une façon pour moi de parler par euphémisme, et d'éviter des procès qu'ils ne manqueraient pas de me faire si je disais la totalité de ma pensée sur leur comportement ; dans la suite, je fais une différence entre les journalistes et les litanistes) et que, soi-même alerté, on voudrait en avoir le cœur net ? Cela n'est pas répréhensible, mais on voit déjà combien les litanistes, marchands de peur, sont à redouter : ils sèment la peur, le trouble, la confusion...

Vient maintenant la question des « additifs »,  qui nous empoisonneraient. Nos litanistes font le lien entre des diarrhées (dues à un norovirus, rien à voir avec des additifs) et les additifs. Ils omettent de dire que le caramel est un additif, comme le glucose (qui est dans tous les fruits et légumes), comme... Passons, car là n'est pas la question. Il est sans doute inutile de discuter une fois de plus (cela fait des décennies que cette discussion a lieu) la question des additifs (méfions-nous des généralités) et d'une sorte de prétendu complot de l'industrie alimentaire. Si les additifs sont autorisés, c'est qu'ils ont fait l'objet de NOMBREUSES études de toxicologie ; et ces études ont été LONGUEMENT examinées par les toxicologues experts européens, qui ont finalement rendu un avis. Ajoutons, de surcroit, que ces mêmes toxicologues qui émettent les avis  mangent eux-mêmes les produits qu'ils autorisent, de sorte qu'ils n'ont pas d'intérêt à s'empoisonner ! 
Donc oublions la questions des additifs. La question de la cuisine moléculaire, et de désagréments ou d'intoxications alimentaires dans de tels restaurants ? Dans un billet précédent, j'ai expliqué qu'une hirondelle ne fait pas le printemps, que quelques cas dans un restaurant ne peuvent être érigés en lois, mais seulement en cas. J'ai dit aussi que le nombre d'intoxications alimentaires consécutives à des repas dans des restaurants traditionnels est bien supérieur au nombre de cas dans les restaurants qui servent de la cuisine moléculaire... et je n'ai pas répété que la définition de la cuisine moléculaire est souvent fausse : la cuisine moléculaire, c'est une cuisine qui se fait avec des ustensiles rénovés, donc pas de quoi fouetter un chat.

Pourquoi, donc, prendre un peu de temps pour discuter ici de toute cette question ? Ce qui m'intéresse, c'est plutôt la question du « débat » à propos non pas de quelques cas de diarrhées, puisque c'est insignifiant, ni à propos d'additifs, puisque là n'est pas la question, mais contre ou avec les litanistes acharnés contre la cuisine moléculaire. Bref, je propose d'analyser la question : on m'invite à  venir débattre contre un litaniste.

« Contre », d'abord : en réalité, j'étais invité à venir faire du spectacle ; on voulait de moi que je sois un gladiateur dans l'arène. Je n'ai pas peur de roquets, la question n'est pas là, mais... débattre contre des journalistes ? Est-ce bien utile ? Et surtout, est-ce bien raisonnable ? Surtout se pose la question du « journalisme », que je propose d'analyser dans une perspective très naïve, d'une collectivité faite d'individus raisonnables et honnêtes, informés par des individus honnêtes et raisonnables. Le journalisme est une activité merveilleuse, quand il nous donne des faits ou des explications utiles pour conduire notre vie, quand il soude les collectivités au lieu de les diviser. Je ne réclame évidemment pas un journaliste de la pensée unique, et l'histoire a bien montré combien un journalisme « critique » (pas au sens de « critiquer », faire des reproches, mais au sens d'analyser pour essayer de démêler le vrai du faux) est utile, collectivement. La vraie question du journalisme est d'abord d'établir les faits. Ici les faits sont : quelques cas, dans un ou deux restaurants (et je répète qu'on ne parle pas des cas dans les restaurants de cuisine traditionnelle), plus des SOMMES d'articles qui étudient l'innocuité des additifs (d'accord, ma formulation est tendancieuse, tout comme l'aurait été celle qui aurait été « qui étudient la toxicité des additifs »).
Pour les faits, rien à débattre : il y a les faits.

Mais je veux m'arrêter ici sur la question des articles, parce qu'elle détermine la réponse à propos du débat « contre », ou « avec », éventuellement, les journalistes.
S'il y a des articles scientifiques à propos des additifs, ou de la toxicologie en général, il y a donc des articles scientifiques (vous voyez que j'avance lentement, dans le raisonnement). Or, lire un article scientifique, ce n'est PAS se contenter de lire un article, en déchiffrant les mots les uns après les autres. J'enseigne à tous les étudiants qui me font l'honneur de venir travailler dans notre Groupe de gastronomie moléculaire que la lecture d'un article, c'est d'abord une lecture critique, qui commence par les « Matériels et méthodes ». Un bon scientifique, en effet, est quelqu'un qui, se fondant sur une expérience très longue (pas un claquement de doigt, des années de travail, inaccessibles à un journaliste, donc), sait évaluer les méthodes utilisées, afin de pouvoir discuter les résultats, et a fortiori les interprétations. Ensuite, la lecture d'un article scientifique, c'est une évaluation relative des concepts, notions, modèles, théories... qui nécessite de bien connaître les sciences (quantitatives).
Un journaliste, surtout un journaliste qui passe sa vie dans les restaurants, n'a pas cette capacité, parce qu'il n'en a pas la formation, l'entraînement ! Ayant travaillé à la revue Pour la Science pendant 20 ans, je sais combien l'examen des articles « de l'extérieur » est un exercice périlleux. Tout tient dans les calculs qui sont faits, dans la fiabilité de l'expérimentation... Je ne dis pas que les journalistes sont des incapables, mais je constate que ce n'est pas leur métier, et donc leur compétence, que de lire des publications scientifiques, surtout quand ils sont chroniqueurs culinaires !

D'ailleurs, il y a bien longtemps, dans un colloque « Chimie et Société » du CNRS, nous avions eu avec un chimiste devenu un ami un débat sur la vulgarisation : mon ami soutenait que la vulgarisation devait être faite par les scientifiques, et je soutenais au contraire qu'elle devait être faite par des journalistes qui travailleraient avec des scientifiques. Des décennies plus tard, je maintiens mon point de vue... en observant que cette production de vulgarisation ne s'accorde peut être pas avec du travail vite fait...

Revenons donc à la question. Débattre avec des collègues ? Très volontiers. Débattre avec des personnes qui n'ont la « compétence » pour le faire ? Il ne peut y avoir que de la pédagogie, pas du débat ! Et mieux, sur des faits (vous vous souvenez que seule la « vérité » m'intéresse), il ne peut pas y avoir de débats. 
Pis encore, il n'aurait rien pu sortir d'un débat avec l'un de nos litanistes, car ces derniers, en réalité, ne veulent pas débattre : ils veulent simplement vendre du papier, du scandale, de la peur. L'information est le cadet de leur souci. Je me souviens, ainsi, d'un de ces litanistes qui, sur une grande radio, enchaînait erreur sur mensonge, complètement imperméable aux réfutations qu'on lui faisait (si je me souviens bien, il confondait même la radioactivité avec la relativité générale!). Quel manque de dignité : personnellement, j'ai honte quand on me reprend, si j'ai fait une erreur... et je m'empresse de rectifier !
Mais il faut relire Platon, qui montre bien que la rhétorique se pare impunément des plumes du paon tout en délivrant des messages fallacieux. En face, il est inutile d'essayer de proposer des faits, fondés sur des études, scientifiques ou technologiques. On ne dit pas assez que de telles études représentent des mois d'efforts pour obtenir des résultats... qui, finalement, ne pèsent rien dans un débat, ou, du moins, pas plus lourd que la parole bien dite.

Allons, soyons positifs, parce que c'est la moindre des politesses.
D'une part, je suis heureux de signaler que, finalement, les journalistes aimables qui m'invitaient à débattre ont changé d'idée, preuve que ceux-là sont fréquentables. Ils ont accepté de ne pas faire de publicité aux litanistes, et sont venus me poser des questions. Pas des questions faciles, et j'ajoute que je les encouragés à poser des « questions qui fâchent » : un homme honnête n'a aucune raison de ne pas répondre à des questions (une façon de dire qu'il n'existe pas, pour lui, de « questions qui fâchent »). 
D'autre part, agent de l'Etat, je sais qu'il y a un devoir d'information du public, afin de répondre à des inquiétudes, injustifiées, certes, mais qui existent (à cause de nos litanistes : les « marchands de peur » sont nuisibles, à ne pas confondre avec de véritables lanceurs d'alerte). J'ai donc dit des faits, après avoir indiqué au préalable que je n'ai rien à vendre : ni article, ni produit, ni idéologie, même. Certes, je pense que la Raison doit être promue, au même titre que la Connaissance, qui nous fait humain, mais ce n'est pas véritablement de l'idéologie. Certes, je propose de voir le verre bien plus qu'à moitié plein... mais à là encore, ce n'est pas de l'idéologie, et seulement de la politesse.
Donnons du bonheur à notre entourage ! 


PS. Ah, un petit morceau qui manquait : je soutiens :
1. qu'il n'existe pas de "conflits d'intérêt" : les intérêts n'ont pas de conflit, mais seulement les individus
2. qu'il est répréhensible, pour un individu, dans certains cas, d'avoir des intérêts cachés ; il faut donc les dire
3. qu'un "expert" qui n'aurait jamais eu de contacts avec l'industrie ne serait sans doute pas un expert, parce qu'il ignorerait tout de l'activité essentielle d'une nation
En conclusion, je propose que les experts aient des intérêts déclarés : logique, non ?

mardi 2 avril 2013

E 413

Les additifs, mauvais pour la santé ? En tout cas, ils sont traditionnels, et les amateurs de "bonne vieille cuisine française" doivent savoir que le E413, la gomme adragante, était non seulement utilisée au siècle passé pour stabiliser les crèmes fouettées (domestiques), mais... présente dès 1604 dans l'Ouverture de cuisine de Lancelot de Casteau  :


Pour faire paste de succre.
Prennez du fin succre bien tamizé par vn fin tamier, puis ayez gomme d'aragante bien trempee en eau de rose passée par vn estamine aussi espes que vous le pouuez passer, puis mettez vostre gomme dedans vn mortier de cuiure ou autre & estampez bien vostre gomme, y mettant tousiours vn peu de succre tant que vous faictes vne paste maniable. Notez tant plus est il battu tant plus blanc deuient il: de ceste paste vous pouués former ce que voulez, comme faire en formes cauees, ou des trenchoirs, ou plats, ou tasses ce que vous voulez, & le mettez suer dedans vn four qui ne soit pas trop chaud, vous le pouuez aussi dorer aussi fort que les voulez auoir: gardez bien que le four ne soit point si chaud qu'il face leuer la paste par bontons, cela ne vaudroit rien, car il faut que la paste demeure ferme.

jeudi 16 août 2012

Les allégations négatives!

Une confiture "sans conservateur" ? C'est idiot, puisque c'est le sucre qui assure la conservation, et qu'il serait absurde d'ajouter des conservateurs inutiles.
Une conserve sans conservateur ? C'est imbécile, puisque l'appertisation est un procédé pour conserver les denrées.

Surtout, porter la mention "sans" (colorant, conservateur, additif, etc.), c'est entretenir des peurs, et, aussi, mépriser le travail des experts qui ont autorisé les produits dont le vendeur signale l'absence.

Luttons contre les marchands de peur !




PS. Evidemment, les divers additifs ne sont autorisés que dans des conditions particulières. Par exemple, le dioxyde de titane, si utilisé par les pâtissiers d'aujourd'hui, ne sont autorisés pour l'industrie que pour teinter en blanc une surface, par pour faire de la coloration de masse, comme je l'ai vu parfois, dans d'autres lieux que l'industrie alimentaire !


dimanche 15 janvier 2012

Questions et réponses

Il n'est pas inutile de faire état d'une réponse du jour, à un email que je reçois : 
 
"Cher Monsieur This,
Elève de première étudiant à Limoges, je vous avais précédemment contactée à propos de notre TPE sur la cuisine note à note.
Nous avons trouvé beuacoup de renseignements sur vos sites mais avec l'avancée de notre travail nous avons quelques questions qui restent sans réponse. Nous vous serions reconnaissants d'y répondre.
D'abord, quel est votre avis concernant la polémique sur l'utilisation d'additifs dans la cuisine moléculaire? Ce débat concerne-t-il également la cuisine note à note?
Ensuite, comment envisagez-vous l'avenir de la cuisine note à note? D'après vous est-elle plutôt destinée aux laboratoires, ou aux cuisines des gastronomes ou encore aux particuliers?
Enfin, que pensez-vous de la cuisine moléculaire? Est-elle seulement l'effet de mode dont parlent certains?"
 
La réponse est la suivante : 
La polémique sur les additifs ? Le peuple a peur de ce qu'il ne connaît pas, et les journalistes ne sont pas tous honnêtes. Les "marchands de peur" se font connaître bien plus que ceux qui n'ont rien à vendre.
Je m'étonne que les mêmes qui refusent des additifs (sachant que le caramel en est un) ne cherchent pas à éviter les barbecues... qui déposent des benzopyrènes cancérogènes sur les viandes !!!!! Voir aussi http://hervethis.blogspot.com/2012/01/denoncons-les-marchands-de-peur.html

L'avenir de la cuisine note à note ? C'est pour tout le monde, parce qu'il y aura bientôt
- une crise de l'énergie
- une crise de l'eau
- 9 milliards d'humains à nourrir

Cela sera exposé les 30 et 31 janviers, et les cours seront podcastés. 
 
La cuisine moléculaire, une mode ? Oui ! Il s'agissait de rénover les techniques culinaires, et c'est fait, puisque même les cuisiniers les plus "réacs" utilisent des siphons, du chocolat chantilly, des gélifiants extraits des algues, de la cuisine basse température. Passons vite à la suite : la cuisine note à note !
 

dimanche 21 mars 2010

Un ministère italien déraille

La revue Nature vient de publier quelques réactions suite à une décision du gouvernement italien d'interdire certains additifs et l'azote liquide en cuisine (on me signale toutefois qu'il s'agit seulement d'obliger les cuisiniers à signaler l'usage d'additifs sur leur carte).

Puis-je vous inviter à lire le texte, sachant que :
- la notion d'additif est bien étrange, le sucre est le sel n'étant pas classés dans les additifs, alors que le caramel y est, par exemple?
- les pâtissiers utilisent classiquement du dioxyde de titane pour obtenir du blanc en surface


Voici la liste :



Les colorants : code en 100
Colorants pour la masse du produit :

E 100 curcumine (colorant jaune) : colorant contenu dans le rhizome d’une plante de la famille des Zingibéracées, Curcuma longa. C’est un additif de code E 100, qui est utilisé dans la fabrication du curry.

E 101 riboflavine ou phosphate-5’-de riboflavine (colorant jaune) (il n'est pas obtenu par synthèse chimique, car ce serait bien trop pénible!

E 102 tartrazine (colorant jaune)

E 104 jaune de quinoléine (colorant jaune)

E 110 sunset yellow FCF ou jaune orangé S (colorant orange)

E 120 cochenille, acide carminique, carmins (colorant rouge); je rappelle que la cochenille est un petit insecte, utilisé pour colorer en rouge depuis des siècles, mais écraser un insecte dans son assiette?

E 122 azorubine, carmoisine (colorant rouge) 

E 123 amarante (colorant rouge)

E 124 ponceau 4R, rouge cochenille A (colorant rouge)

E 127 erythrosine (colorant rouge)

E 128 rouge 2G (colorant rouge)

E 129 rouge allura AC (colorant rouge)

E 131 bleu patenté V (colorant bleu) : celui de nos Curacaos!

E 132 indigotine, carmin d’indigo (colorant bleu)

E 133 bleu brillant FCF (colorant bleu),

E 140 chlorophylles et chlorophyllines (colorant vert) : les chlorophylles sont les pigments jaune à bleu des légumes verts ; ici, ils ont été extraits, généralement de la luzerne, par des procédés en tous points identiques à la préparation du vert d'épinard.

E 141 complexes cuivre-chlorophylles et complexes cuivre-chlorophyllines (colorant vert)

E 142 vert S (colorant vert)

E 150 caramel ordinaire (colorant brun) : le caramel!!!!!

E 150b caramel de sulfite caustique (colorant brun)

E 150c caramel ammoniacal (colorant brun)

E 150d caramel au sulfite d’ammonium (colorant brun)

E 151 noir brillant BN, noir PN (colorant noir

E 153 charbon végétal médicinal (colorant noir) : on s'en sert pour se soigner!

E 154 brun FK (colorant brun)

E 155 brun HT (colorant brun)

E 160a caroténoïdes (mélangés, ou bêta-carotène) (colorant) : les caroténoïdes sont les pigments des carottes, et des végétaux en général : comment les interdire?

E 160b rocou, bixine, norbixine (colorant) : mes amis d'Amérique du Sud ne vont pas être heureux que l'Italie leur interdise ce colorant traditionnel

E 160c extrait de paprika, capsanthine, capsorubine (colorant)

E 160d lycopène (colorant) : celui ci donne ses belles couleurs à la tomate

E 160e bêta-apocaroténal-8’(colorant couleur variée)

E 160f ester éthylique de l’acide bêta-caroténique-8’ (colorant)

E 161 xanthophylles (colorant) : encore des pigments "naturels"

E 161b lutéine (colorant)

E 161g canthaxanthine (colorant)

E 162 rouge de betterave, bétanine (colorant) : faut-il vraiment un commentaire?

E 163 anthocyanes (colorant)


Colorants utilisables pour les surfaces seulement :

E 170 carbonates de calcium (carbonate et carbonate acide) (colorant pour surfaces seulement)

E 171 dioxyde de titane (colorant pour surfaces seulement) : je vous l'avais dit!

E 172 oxyde et hydroxyde de fer (colorant pour surfaces seulement)

E 173 aluminium (colorant pour surfaces seulement)


E 174 argent (colorant pour surfaces seulement)

E 174 or (colorant pour surfaces seulement) : les feuilles d'or, interdites même dans les risotto?


Colorant pour les croutes de fromage :
E 180 lithol-rubine BK (colorant pour croûtes de fromage)


Agents conservateurs : codes en 200 : pour ces produits, une interdiction d'utilisation par les restaurateurs serait moins gênante, parce que la cuisine fait peu usage de conservateurs, mais se pose surtout la question de savoir comment la réglementation pourait être appliquée. En effet, les petits industriels, comme les gros, ont besoin de ces produits, sans quoi nos épiceries vont se vider dramatiquement. Quelle est la différence entre un chef qui anime une dizaine de restaurants, et qui, de ce fait, peut être à la tête d'une centaine de personnes, et un petit industriel qui emploierait une dizaine de personnes ?

E 200 acide sorbique (conservateur)

E 201 sorbate de sodium (conservateur)

E 202 sorbate de potassium (conservateur)

E 203 sorbate de calcium (conservateur)

E 210 acide benzoïque (conservateur)

E 211 benzoate de sodium (conservateur)

E 212 benzoate de potassium (conservateur)

E 214 parahydroxybenzoate d’éthyle (conservateur)

E 215 forme sodique de E 214 (conservateur)

E 216 parahydroxybenzoate de propyle (conservateur)

E 217 forme sodique de E 216 (conservateur)

E 218 parahydroxybenzoate de méthyle (conservateur)

E 219 forme sodique de E 218 (conservateur)

E 220 anhydride sulfureux (conservateur et agent antioxygène secondaire) : celui-ci, si on l'interdit, on abat les vignerons, puisque c'est le produit qui conserve les vins!!!!!

E 221 sulfite de sodium (conservateur et agent antioxygène secondaire)

E 222 sulfite acide de sodium (bisulfite) (conservateur et agent antioxygène secondaire)

E 223 disulfite de sodium (pyrosulfite ou métabisulfite) (conservateur et agent antioxygène secondaire)

E 224 disulfite de potassium (conservateur et agent antioxygène secondaire)

E 226 sulfite de calcium (conservateur et agent antioxygène secondaire)

E 227 sulfite acide de calcium (bisulfite) (conservateur)

E 230 diphényle (conservateur)

E 231 orthophénylphénol de sodium (conservateur)

E 232 orthophénylphénate de sodium (conservateur)

E 233 thiabendazole (conservateur)

E234 nisine : utilisée en Europe pour la conservation ; c’est une bactériocine produite par Lactococcus lactis, qui tue les micro-organismes Gram +

E 235 natamycine (pimaricine) (conservateur)

E 236 acide formique (conservateur)

E 237 formate de sodium (conservateur)

E 238 formate de calcium (conservateur)

E 239 hexaméthylène diamine (conservateur)

E 242 diméthyldicarbonate (conservateur)


Agents conservateurs secondaires :
E 249 nitrite de potassium (conservateur secondaire)

E 250 nitrite de sodium (conservateur secondaire)

E 251 nitrate de sodium (conservateur secondaire) : : au fait, il faut dire que le salpètre est utilisé dans toutes les bonnes charcuterie!

E 252 nitrate de potassium (conservateur secondaire)

E 260 acide acétique (conservateur secondaire) : l'acide de tous nos vinaigres! Tiens à propos de vinaigre, et si l'on faisait d'abord cesser ce scandale des "vinaigres balsamique de Modène" qui ne sont souvent que des mélanges de vinaigre et de caramel? Et puis, tant qu'on y est, et si l'Italie faisait mieux le ménage à propos de la mozzarella, dont on vient de découvrir qu'un quart (affiché : vous imaginez ce que la réalité doit être) était fait au lait de vache, et non au lait de bufflonne?

E 261 acétate de potassium(conservateur secondaire)

E 262 acétates de sodium (acétate et diacétate) (conservateur secondaire)

E 263 acétate de calcium (conservateur secondaire)

E 270 acide lactique (conservateur secondaire et agent renforçateur d’oxygène) : il s'en forme dans tous les laitages fermentés!!!!

E 280 acide propionique (conservateur secondaire)

E 281 propionate de sodium (conservateur secondaire)

E 282 propionate de calcium (conservateur secondaire)

E 283 propionate de potassium (conservateur secondaire)

E 290 dioxyde de carbone (conservateur secondaire)

E 296 acide malique (conservateur secondaire)

E 297 acide fumarique (conservateur secondaire)


Agents antioxygènes :
E 300 acide ascorbique (agent antioxygène)

E 301 ascorbate de sodium (agent antioxygène)


E 302 ascorbate de calcium (agent antioxygène)

E 303 diacétate d’ascorbyle (agents antioxygènes)

E 304 esters gras de l’acide ascorbique (palmitate d’ascobyle et stéarate d’ascorbyle) (agent antioxygène)

E 306 extraits riches en tocophérols (agent antioxygène)

E 307 alpha-tocophérol (agent antioxygène)

E 308 delta-tocophérol (agent antioxygène)

E 308 gamma-tocophérol (agent antioxygène)

E 309 delta tocophérol (agent antioxygène)

E 311 gallate d’octyle (agent antioxygène)

E 312 gallate de dodécyle (agent antioxygène)

E 315 acide érythorbique (agent antioxygène)

E 320 BHA (butylhydroxyanisol) (agent antioxygène)

E 321 butylhydroxytoluène (BHT) (agent antioxygène)


Antioxygène secondaires :
E 322 lécithines (agent antioxygène secondaire et émulsifiant/épaississant)


Agents renforçateurs anti-oxygène :

E 325 lactate de sodium (et agent renforçateur d’oxygène)

E 326 lactate de potassium (et agent renforçateur d’oxygène)

E 327 lactate de calcium (et agent renforçateur d’oxygène)

E 330 acide citrique (acidifiant et agent renforçateur d’oxygène) : l'acide principal du jus de citron!

E 331 citrates de sodium (citrate monosodique, citrate disodique, citrate trisodique) (et agent renforçateur d’oxygène)

E 332 citrates de potassium (monopotassique, tripotassique) et agent renforçateur d’oxygène)

E 333 citrates de calcium (mono, di, tri) et agent renforçateur d’oxygène)

E 334 acide tartrique (L(+) et agent renforçateur d’oxygène)

E 335 tartrates de sodium (mono et di) et agent renforçateur d’oxygène)

E 336 tartrates de potassium (mono et di) et agent renforçateur d’oxygène)

E 337 tartrate double de sodium et de potassium et agent renforçateur d’oxygène)

E 338 acide orthophosphorique (et agent renforçateur d’oxygène)


Agents de texture :
E 1105 lysozyme (conservateur secondaire)

E 1200 polydextrose

E 1400 dextrine blanche (émulsifiant/épaississant )

E 1401 amidon fluide (émulsifiant/épaississant ) : interdire l'amidon?

E 1402 amidon alcalin (émulsifiant/épaississant )

E 1403 amidon alcalin blanchi (émulsifiant/épaississant )

E 1404 amidon oxydé (émulsifiant/épaississant )

E 1410 phosphate d’amidon (émulsifiant/épaississant)

E 1412 phosphate de diamidon émulsifiant/épaississant)

E 1413 phosphate de diamidon phosphaté (émulsifiant/épaississant)

E 1414 phosphate de diamidon acétylé (émulsifiant/épaississant)

E 1420 amidon acétylé (émulsifiant/épaississant)

E 1422 adipate de diamidon acétylé (émulsifiant/épaississant)

E 1440 amidon hydroxypropylé (émulsifiant/épaississant)

E 1442 phosphate de diamidon hydroxypropylé (émulsifiant/épaississant)

E 1450 octényle succinate d’amidon sodique (émulsifiant/épaississant)

E 339 orthophosphate de sodium (et agent renforçateur d’oxygène et émulsifiant/épaississant)

E 340 orthophosphate de potassium (émulsifiant/épaississant et agent renforçateur d’oxygène)

E 341 orthophosphate de calcium (émulsifiant/épaississant et agent renforçateur d’oxygène)

E 350 malate de sodium (malate et malate acide)

E 351 malates de potassium

E 352 malates de calcium (malate et malate acide)

E 354 tartrate de calcium

E 380 citrate de triammonium

E 400 acide alginique (émulsifiant/épaississant et gélifiant

E 401 alginate de sodium (émulsifiant/épaississant)

E 402 alginate de potassium (émulsifiant/épaississant)

E 403 alginate d’ammonium (émulsifiant/épaississant)

E 404 alginate de calcium (émulsifiant/épaississant)

E 406 agar-agar (émulsifiant/épaississant)

E 407 carraghénanes (émulsifiant/épaississant)

E 410 farines de graines de caroube (émulsifiant/épaississant)

E 412 gomme guar (émulsifiant/épaississant)

E 413 gomme adragante, tragacanthe (émulsifiant/épaississant)

E 414 gomme d’acacia ou gomme arabique (émulsifiant/épaississant)

E 415 gomme xanthane (émulsifiant/épaississant)

E 417 gomme tara

E 418 gomme cellane

E 420 sorbitol (sorbitol ou sirop)

E 421 manitol

E 422 glycérol

E 440 pectines (pectine, pectine amidée) (émulsifiant/épaississant)

E 450 polyphosphates de sodium et de potassium (émulsifiant/épaississant)

E 460 cellulose (microcristalline, en poudre) (émulsifiant/épaississant)

E 461 méthylcellulose (émulsifiant/épaississant)

E 462 éthylcellulose (émulsifiant/épaississant )

E 463 hydroxypropylcellulose (émulsifiant/épaississant)

E 464 hydroxypropylméthylcellulose (émulsifiant/épaississant)

E 465 éthylméthylcellulose (émulsifiant/épaississant)

E 466 carboxyméthylcellulose ou carboxyméthylcellulose de sodium

E 470a sels de sodium, de potassium et de calcium d’acides gras (émulsifiant/épaississant)

E 470b sels de magnésium d’acides gras (émulsifiant/épaississant)

E 471 mono- et diglycérides d’acides gras (émulsifiant/épaississant

E 472a esters acétiques des mono- et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur d’oxygène)

E 472b esters lactiques des mono- et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur d’oxygène)

E 472c esters citriques des mono- et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur d’oxygène)

E 472d esters tartriques des mono- et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur
d’oxygène)

E 472e esters monoacétyltartrique et diacétyltartrique des mono et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur d’oxygène)

E 472f esters mixtes acétiques et tartriques des mono- et diglycérides d’acides gras (et agent renforçateur d’oxygène)

E 473 sucresters (saccharose, acides gras) (émulsifiant/épaississant )

E 474 sucroglycérides (saccharose, mono et diglycérides d’acides gras) émulsifiant/épaississant )

E 475 esters polyglycériques d’acides gras (émulsifiant/épaississant )

E 477 monoesters du polyéthylène glycol (émulsifiant/épaississant

E 480 acide stéraoyl-2-lactylique (émulsifiant/épaississant )

E 481 sel sodique de E 480 (émulsifiant/épaississant )

E 482 sel calcique de E 480 (émulsifiant/épaississant )

E 483 tratrate de stéraoyle (émulsifiant/épaississant )

E 500 carbonates de sodium (carbonate, carbonate acide, sesquicarbonate)

E 501 carbonates de potassium (carbonate et carbonate acide)

E 503 carbonates d’ammonium (carbonate, carbonate acide)

E 504 carbonates de magnésium (carbonate, carbonate acide)

E 507 acide chlorhydrique divers

E 508 chlorure de potassium

E 509 chlorure de calcium

E 511 chlorure de magnésium

E 513 acide sulfurique

E 514 sulfates de sodium (sulfate, sulfate acide)

E 515 sulfates de potassium (sulfate, sulfate acide)

E 516 sulfate de calcium

E 524 hydroxyde de sodium

E 525 hydroxyde de potassium

E 526 hydroxyde de calcium

E 527 hydroxyde d’ammonium

E 528 hydroxyde de magnésium

E 529 oxyde de calcium

E 530 oxyde de magnésium

E 570 acides gras

E 574 acide gluconique

E 575 glucono-delta-lactone

E 576 gluconate de sodium

E 577 gluconate de potassium

E 578 gluconate de calcium

E 640 glycine et son sel de sodium

E 938 argon

E 939 hélium

E 941 azote

E 942 protoxyde d’azote

E 948 oxygène

E 950 acesulfame K édulcorant

E 951 aspartame

E 952 acide cyclamique (cyclohexylsulfamique) et ses sels de Na et Ca ; DL50 entre 5 et 10 g/kg, par voie orale ; DJA 11 mg/kg, bien que l’on ait observé une cancérogénicité et des troubles de la reproduction. (i)

E 953 isomalt

E 954 saccharine et ses sels de Na, K, Ca

E 957 thaumatine

E 959 néohespéridine DC

E 965 maltitol (maltitol, sirop)

E 967 xilitol


Au terme de cette liste, j'ai vu trop de produits "traditionnels" pour ne pas, une fois de plus, m'étonner. Mais je crains que cet étonnement ne me vaille une accusation de "collusion avec l'industrie chimique", qui, hélas, n'existe pas. Si seulement l'industrie chimique donnait des sous à mon laboratoire!!!!!!