mardi 28 juin 2011

Faut-il toujours répondre?

Récemment, la Harvard School of Applied Sciences a affiché un poste d'enseignant en "science and cooking".
Merveilleux, donc... à deux points près :
1. science et cuisine : c'est vague ! que veut-on enseigner : la science, ou bien la cuisine ? dans une école d'ingénieur, je suppose que c'est la technologie, qui serait l'objectif, mais ici ?
2. il y a quand même ce terrible nom de l'institution "applied sciences" : je ne vais pas me remettre à dire combien cette terminologie est fautive, puisque j'en ai déjà fait des tas de pages de blog, et un livre tout entier "Science, technologie, technique, quelles relations?". Oui, il n'y a pas de "sciences appliquées", il y a des sciences, d'une part, et des applications des sciences, d'autre pars. Ces applications sont de la technique, via la technologie.

Du coup, j'ai écrit au doyen de Harvard pour lui signaler les deux choses... et je n'ai pas eu de réponse à ce jour. Je sais que la lettre lui est bien parvenue. Est-ce de l'impolitesse qui s'ajouterait à son incurie intellectuelle ?

lundi 27 juin 2011

Dimanche 3 juillet à Strasbourg

Dimanche 3 juillet, à Strasbourg, à la Cité de la musique et de la danse, 17 heures : conférence "Vive la chimie, vive la cuisine" !

Et, comme dit dans le titre, Vive la gourmandise éclairée !

jeudi 23 juin 2011

mercredi 22 juin 2011

Hic sunt leones

Hinc sunt leones : ici il y a des lions. C'est ce qui était écrit sur les cartes anciennes, au delà des limites connues. L'inconnu est (peut-être) plein de dangers. Prudence.

De ce fait, alors que la "cuisine note à note" se profile, je dis moi-même : travail sans être timorés, mais avec prudence.

De même qu'un couteau, outil culinaire traditionnel, est dangereux, de l'azote liquide, outil de cuisine moléculaire, est dangereux. Et la cuisine "note à note", aussi, aura ses dangers.

J'y vais doucement : le couteau, d'abord. C'est parce qu'il est plié, dans la poche, que l'on ne s'ouvre pas l'artère fémorale, et c'est en recourbant les doigts que l'on évite de se couper quand on cisèle des oignons.

L'azote liquide ? Là encore, distinguons le danger et le risque. Si nous mettons un doigt dans l'azote liquide, il se congèle, et une pichenette le fait tomber (pensons aux alpinistes aux doigts gelés). En revanche, si nous y faisons attention, nous réduisons le risque. En tout état de cause, il faut être fou ou inconscient, ou suicidaire, pour le mettre dans une bouteille thermos fermée : son évaporation inéluctable transformera la thermos en bombe ! De même qu'il faudrait être fou, ou inconscient, ou suicidaire, pour verser une grande quantité d'eau sur de l'huile bouillante enflammée. Et il y a, semble-t-il, eu un jeune Allemand qui a perdu deux mains avec l'azote liquide mal manipulé. Ce n'est pas que l'azote liquide soit plus dangereux que les couteaux : bien plus de gens meurent avec des couteaux qu'avec de l'azote liquide.

La cuisine note à note ? Elle a ses dangers, et nous devons l'apprendre ! Pour autant, ses dangers ne doivent pas être une raison pour ne pas l'explorer. Au contraire !!!! Il faut travailler pour apprendre ses limites, ses dangers, ses intérêts...

Amusons nous à faire des choses passionnantes et importantes !

samedi 18 juin 2011

Coup de coeur

En juillet, mon collègue et ami Jacques Guinberteau publie  Le Petit livre des champignons des dunes, sujet totalement inédit sur lequel l'auteur travaille depuis plusieurs années.

lundi 13 juin 2011

L'exagération abat la vérité

C'est une étrange tournure d'esprit, et, je crois, une faute, que d'exagérer les vertus de la chimie pour en démontrer l'importance

Il y a quelques années, une stratégie des milieux scientifiques et technologiques, autour de la chimie et des ses applications (je propose de ne pas confondre) était de dire que "tout est chimie". Si l'on cuisine, on aurait fait de la chimie ; si l'on respire, on aurait fait de la chimie...

Je crois que cette stratégie est mauvaise : oui, des réactions ont lieux, entre les molécules de l'organisme, quand on respire, mais la personne qui respire n'est pas chimiste pour autant... sans quoi la chimie n'a plus de raison d'exister ; ce serait la vie tout entière

Or la chimie est une science, et celui qui respire n'est pas un scientifique.

Je propose donc, au contraire, de réserver le nom de chimie à la science qui explore les réarrangements d'atomes.

Et j'en profite pour signaler que la difficile question débattue ici, du nominalisme et de l'idéalisme, n'est pas neuve. Déjà Chaptal était tenté par un impérialisme chimique, comme on le voit dans la leçon inaugurale de son cours de Minéralogie et d’histoire naturelle, prononcée en novembre 1780 devant « Messeigneurs les gens des trois états de la Province de Languedoc », Chaptal rappelle les atouts de la Province :

Un commerce actif, des manufactures nombreuses, une terre qui, par le contraste le plus étonnant, offre à la fois des produits de midi et ceux du nord ; des mines riches dans les Cévennes, où la stérilité du sol rend leur exploitation nécessaire ; une abondance de vin qui en permet la distillation ; des salins que l’on peut multiplier à son gré, etc.
Il ajoute :
La plupart de ces objets sont l’ouvrage de la chimie, et tous en attendent leur perfection. 
Quoi : l'exploitation des mines serait chimie ? Et la distillation ? Et les salins ? Ce sont des industries merveilleuses, certes, mais... de la chimie ? 
Pour la distillation, c'est une technique, et pas de la science. De même pour l'exploitation des mines, même s'il est exact qu'il faille opérer des transformations pour séparer les métaux des minerais, par exemple. Pour le sel, il faut signaler que l'on se limite soit à tailler des blocs de sels, soit à injecter de l'eau, récupérer une saumure que l'on évapore... 
Au total, seule la transformation des minerais en métal relève de la "chimie", et encore : la mise en oeuvre de réactions n'est pas de la science ! Sans quoi on retombe dans la faute précédente, à savoir que respirer (la mise en oeuvre de réactions) serait de la chimie, ce qui n'est pas juste


Bref, je propose de réserver le nom de "chimie" à la science qui explore les réarrangements d'atomes, à ne pas confondre science et technologie, ou même technique (il faudra un jour que j'évoque la terminologie "technoscience", qui me semble aussi insensée que "carré rond"). Vive la chimie ! Vive les (belles) applications de la chimie ! Rassurons-nous : il n'y aura jamais de chimie dans l'assiette!

Votre avis ?

jeudi 9 juin 2011

lundi 6 juin 2011

Un paradoxe

J'y reviens : nous avons fait une erreur collective en clamant "Vive la science", ce qui a attiré vers la science une foule de jeunes qui n'ont pas l'idée politique de l'administration (au sens le plus noble, sans cette connotation du "minimis"), ni toujours la "folie" du calcul, du "y penser toujours".
Bref, nous avons crié "Vive la science", alors qu'il aurait fallu crier "Vive la technologie", afin de promouvoir des carrières d'ingénieurs. Pierre Gilles de Gennes disait d'ailleurs que peu de gens dans son équipe du Collège de France étaient capables de faire de bons ingénieurs de recherche pour l'industrie : je prends cette remarque pour bien signifier que je ne place pas la technologie au dessous de la science, ni au dessus ; plus simplement, on ne peut pas comparer des choses qui ne sont pas comparables.

Bref, nous aurions dû nationalement faire comme Louis Figuier, il y a un siècle, avec ses enthousiasmants livres "Les merveilles de l'industrie". Oui, c'est dans l'industrie qu'il y a de l'emploi, des possibilités de créer des sociétés qui créent de l'emploi, etc.

Du coup, le paradoxe, c'est que moi, scientifique ébloui par la science, je risque de me retrouver en train de crier "Vive la technologie !"... ce que j'ai déjà fait plusieurs fois.

C'est incohérent. Du coup, une proposition : la cuisine est comme une racine d'où naîssent des métiers, de techniciens, artiste, historien, géographe, technologue (ingénieur), scientifique...
Aucun métier n'est mieux qu'un autre, et chacun peut y trouver son bonheur.

Vive la gourmandise éclairée, de toute façon!